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Les Rased aident-ils vraiment les élèves en difficultés ?

Force est de constater que de nombreux dysfonctionnements de ces réseaux d’aides les détournent de leur rôle premier et posent à terme leur pertinence dans leur organisation actuelle. Que leur reproche-t-on généralement ? Faisons le tour de quelques salles des maîtres et tendons l’oreille. Nous y entendons alors parler d’une structure trop lourde et contraignante, d’un manque de disponibilité, de l’insuffisance du nombre de prises en charge, d’un lieu refuge pour enseignant ne voulant plus de classe, d’une absence d’investissement dans les écoles, de réponses et de solutions aléatoires… Des remarques qui ne feront pas plaisir à certains sans doute mais qui, malgré leur sévérité apparente, posent de vrais problèmes quant aux fonctionnements et aux rôles de ces réseaux ainsi qu’aux statuts des personnes qui y travaillent.

Le temps entre le premier signalement de l’enfant par l’enseignant et le début d’une éventuelle aide est souvent trop long : imprimé et/ou dossier à remplir, rencontre avec le réseau, projet à définir, concertation du dit réseau, contact avec les familles… Certes, il ne s’agit pas d’accepter que des enseignants se départissent simplement des enfants en difficulté en les confiant aux réseaux prétextant que c’est leur rôle. Les Rased ont sans doute voulu se protéger de ce risque. Mais n’est-on pas tombé dans l’excès inverse en multipliant les démarches ? Pendant ce temps, l’enfant et l’enseignant sont toujours dans leur classe face à leurs problèmes. Parfois même, le nombre d’heures hebdomadaire consacrées aux concertations, réunions, rendez-vous est supérieur au nombre d’heure de prise en charge d’enfants. Que dirait-on d’un enseignant passant plus de temps hors de sa classe que face aux enfants ?

De trop nombreux membres de ces réseaux refusent encore l’observation dans les classes, (comme certains enseignants) ou la présence avec l’enseignant pour mener une activité par groupe de besoins ou toute autre forme de travail collectif en décloisonnement, déclarant que ce n’est pas leur rôle. Pourtant des collègues souhaiteraient privilégier ce type de travail, le pensant plus efficace tant au niveau de l’aide apportée aux enfants qu’au niveau de la réflexion entre adultes.

La fréquence des prises en charge d’enfants est souvent trop faible. Que signifie accueillir un enfant et l’aider une demi-heure par semaine ? Sans compter « les séances qui sautent » pour sortie de classe ou événement exceptionnel dans l’école. Quelle valeur cela peut-il avoir pour l’enfant ? Et quelle efficacité ?

Des réseaux ont des projets de fonctionnement qui mettent les écoles devant le fait accompli. « Voici comment nous fonctionnons ». « Voilà comment vous devez procéder pour qu’on se penche sur les problèmes des enfants ». Ne serait-ce pas aux réseaux de s’adapter à la spécificité de chaque école ?
Certains membres des Rased souhaitent garder une certaine distance par rapport à la vie des écoles et se placent volontiers en position de thérapeutes qu’ils ne sont pas pourtant. D’autres ne rejettent pas leur fonction première mais aiment à souligner leur spécificité en l’installant dans un fonctionnement qui les éloigne du reste de l’équipe enseignante. Veulent-ils vraiment en faire partie ? Certains réseaux ne sont pas représentés dans les conseils d’école, de maîtres ou de cycles lorsque « l’ordre du jour ne les concerne pas. »

Nombre d’enfants qui leur sont signalés ne relèvent pas de leurs compétences et ou de leurs possibilités matérielles, pendant que d’autres enfants qui relèveraient de leur champ d’action ne sont pas pris en charge faute de temps et de moyens. Cela pose d’une façon générale le problème de l’intégration : l’école peut-elle accueillir tout le monde sans s’en donner réellement les moyens ? La réponse est non. En attendant que tout le monde en prenne conscience, les enfants concernés et les enseignants en souffrent.

Il faut, dans les écoles, des enseignants spécialisés aux compétences affinées dans différents domaines. Mais ont-ils besoin de fonctionner dans une structure à part ? Les membres des Rased ne doivent-ils pas faire partie intégrante des équipes pédagogiques et intervenir dans des activités mises en place dans les projets de classes, de cycles, d’écoles ? Leur intégration réelle dans la vie des écoles permettrait une meilleure prise en compte des enfants en difficulté. Cela se fait déjà avec ceux qui ont accepté de redéfinir leur statut et leur rôle sans se réfugier derrière des textes. Cela ne repose que sur la bonne volonté de celles et de ceux qui s’y engagent. Mais ne serait-ce pas, une fois de plus, le mode de fonctionnement estampillé « Education Nationale » ?

Christian Maire, maître formateur, Montmorency (Val d’Oise).


La FNAME (Fédération Nationale des Maîtres E) a souhaité répondre à cet article par la voix de sa secrétaire, Catherine ALLART :
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