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« L’envie de faire un portrait nait d’un écho à mes propres interrogations »

Comment parvenez-vous à un portrait ?
monique-royer-200px.jpgLe portrait commence par un premier contact avec la personne. C’est parfois quelqu’un que j’ai repéré sur les réseaux sociaux ou que je connais, d’autres fois, je reçois un mail pour me signaler une personne intéressante. Mais toujours, l’envie de faire le portrait nait d’une curiosité, d’un écho à mes propres interrogations, d’une envie d’en savoir plus. Je ne récolte pas toujours des réponses positives. Le non est lié la plupart du temps à un refus de se mettre en avant, à une impression de ne pas faire quelque chose d’extraordinaire. Mais c’est justement cela qui m’intéresse, ce qui semble ordinaire et qui pourtant qui amène une façon d’apprendre et d’enseigner en rupture avec les représentations les plus communes sur l’école.

Après ce premier contact, nous prenons rendez-vous pour un entretien téléphonique, une conversation à bâtons rompus. Ce dialogue informel permet de visiter les chemins de traverse, de laisser des idées se développer et de découvrir réellement la personne et son projet. Ensuite, je tisse un récit à partir des propos recueillis. Je note un maximum de choses pour rester fidèle à ce qui est dit, ne pas être tentée de raconter une autre histoire que celle entendue. Puis je fais relire le texte. Cette dernière étape est importante. Le portrait est basé sur la confiance et ce qui est écrit, publié, doit refléter la personne. Des propos sont dits mais avec le recul, ne sont pas destinés à être lus.

Quels intérêts trouvez vous à récolter ces portraits ? Et les lecteurs ? Et les personnes interrogées ?
Cela fait plus de dix ans que je raconte l’école au travers des initiatives menées par les enseignants. Je suis toujours épatée par la créativité des profs, dans un métier où les particularités ne sont pas couramment admises, acceptées. J’aime bien comprendre ce qui a fait naitre un projet, des projets, quel parcours ont eu les initiateurs, quelles questions ils se sont posées.
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Je suis une indécrottable optimiste et chaque semaine je rebooste cet optimisme, même si les récits comportent aussi des difficultés à enseigner, apprendre autrement, au quotidien. Plus cette façon d’aborder l’école sera connue, partagée, plus il sera facile à ces enseignants d’exercer ainsi leur métier. Là, c’est mon côté militant qui ressort. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que les portraits sont hébergés par le Crap-Cahiers Pédagogiques.
Et puis, j’y trouve un intérêt personnel, pour nourrir mes propres réflexions et projets dans mon quotidien professionnel. L’écriture est un peu mon jardin et je prends énormément de plaisir à raconter la vie des autres, avec une grande liberté d’écriture dans un cadre formalisé. Je progresse et j’apprends de semaine en semaine. Et être publiée, pour une amateure, c’est une chance formidable.
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Pour les personnes interrogées, le portrait est l’occasion de se replonger dans ce qui est fait ou a été fait et pour certains, de sortir d’un isolement perçu ou réel. Ancienne accompagnatrice en VAE, je retrouve un peu ce processus où on réalise comment on a fait quelque chose, tous les chemins qui mènent au professionnel que nous sommes aujourd’hui. J’aime beaucoup cette relation de confiance qui se tisse en même temps que le récit émerge.

Comment va évoluer ce projet portraits ?
La question est difficile parce que les portraits sont aussi pour moi un grand espace de liberté où le hasard s’immisce. La programmation y a peu de place. J’aimerais développer les portraits de groupes, d’associations, d’établissements, de collectifs. Mais cela dépendra aussi des idées, des suggestions qui arriveront jusqu’à moi.
J’avais peur au départ d’être à court d’idées. Aujourd’hui ce serait plutôt le contraire… Le temps me semble trop court pour raconter tout ce qui se passe au quotidien dans l’éducation, par la force et la créativité des acteurs qui l’animent. Et puis, je fais moi-même partie d’un collectif, celui du CRAP et des Cahiers Pédagogiques. Et de ce collectif viendra aussi des idées, des orientations.

Monique Royer