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Décrochage : des pistes pour tous

Vous préconisez d’organiser un tutorat des élèves. Qui pourrait s’en occuper ? Avec quelle formation ?

D’une manière générale, observateurs et chercheurs s’accordent à dire que les démarches et les dispositifs les plus efficaces sont ceux qui partent de l’intérieur de l’école et qui prennent en compte en même temps les aspects relationnels et les difficultés liées aux apprentissages. Le travail d’équipe entre enseignants, mais aussi entre les diverses catégories professionnelles à l’école, est une condition incontournable pour la mise en place de stratégies pédagogiques et éducatives communes ou pour la réflexion autour des d’élèves particulièrement en difficulté.

Il permet entre autres d’établir un tutorat individualisé auprès de certains d’entre eux, par des enseignants ou d’autres personnels de l’école, mais cela ne s’improvise pas ! Comment établir une relation de confiance ? De quoi se compose l’action en tutorat ? Quand faut-il passer le relai à d’autres ? Comment peut-on être enseignant et tuteur à la fois ? Autant de questions à débattre en formation.

Vous dites également souhaiter revoir le système de notation. Faites-vous allusion aux compétences, à la fin de la note ?

L’accumulation de mauvaises notes telles qu’elles sont appliquées aujourd’hui peut décourager les élèves ; on pourrait envisager un système d’appréciations qui soulignerait les acquisitions et non pas les manques, comme cela est encore trop souvent le cas aujourd’hui. L’utilisation simplifiée du livret personnel de compétences des élèves (autour du socle commun) donne à ce propos des résultats intéressants.

Vous parlez aussi de « repenser l’organisation des classes ». De quelles manières et à quels niveaux d’enseignement ?

Les dispositifs de prévention du décrochage ou de raccrochage utilisent des méthodes diversifiées, sur la base de l’alternance entre des travaux en petit groupe ou en individuel et des cours plus collectifs. Ces expériences aux résultats reconnus sont autant de laboratoires expérimentaux dont peuvent s’inspirer les établissements scolaires, encore contraints par la forme classique « une classe, un maitre », où les élèves sont plus en compétition les uns avec les autres que dans une dynamique coopérative.

Mais la clé de voute de tout cela est sans doute le regard bienveillant sur l’ensemble des élèves et particulièrement ceux qui ne répondent pas stricto sensu aux impératifs du « métier d’élève ». L’influence du climat scolaire sur le déroulement de la scolarité dans de bonnes conditions est soulignée par plusieurs chercheurs. Plus il est chaleureux et encourageant, moins le risque de décrochage est présent ! Changer de regard sur les élèves, donner un statut à l’erreur non pas comme faute (les fautes d’orthographe !), mais comme étape dans les apprentissages, développer le sentiment d’appartenance à la communauté scolaire et éducative, renforcer les relations avec les familles, tout cela permet de lutter efficacement contre le décrochage. En conclusion, ce ne sont pas les dispositifs qui sont prépondérants, mais bien la manière dont ils sont mis en œuvre !

Maryse Esterle
Sociologue, université d’Artois-IUFM, chercheuse au CESDIP-CNRS (Guyancourt)