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Atelier filles – garçons

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Problématique de l’atelier

Historique
La mixité est mise en place pour des raisons économiques et démographiques avant tout, surtout dans les zones rurales et après la guerre au vu de l’explosion démographique.
Ce n’est que peu à peu que l’on passe de la mixité interdite puis tolérée et la mixité comme norme. La mixité devient obligatoire en 1975. Tout se passe comme si la mixité allait de pair avec égalité de traitement et égalité des chances. Il faut attendre fin des années 80 pour que la recherche montre des inégalités de traitement. Aujourd’hui travaille-t-on sur l’égalité des genres dans le quotidien de la classe ?

Constat
Le système scolaire, qui a pour principe fondamental l’égalité de traitement, n’offre pas la garantie d’une perception égalitaire des aptitudes masculines et féminines et des rapports sociaux. Chacun des genres est enfermé dans des stéréotypes. Les filles restent dans des rôles subalternes et les garçons cantonnés dans la compétition.
Les filles réussissent à l’école plus que les garçons, les garçons, surtout dans les milieux populaires, rejettent l’institution école. Cependant l’orientation des unes est prédéfinie vers des filières technologiques peu valorisées (STT ou SMS) ou des cycles universitaires offrant peu de débouchés. Elles fréquentent les premiers cycles et sont les premières à les quitter.
Egalité de droit n’est pas synonyme d’égalité de fait.
Les filles sont contraintes de différentes sortes et les garçons sont excusés de leur attitude par le biais de l’appartenance culturelle ou l’histoire des mœurs.
Ces faits peuvent si on n’y prend garde figer les genres dans des stéréotypes qui interdisent toute évolution.

Témoignage de Bernard Hoarau, professeur d’EPS, à propos d’un cycle d’escalade de neuf semaines.
Présentation d’une expérience où filles et garçons d’une même classe de première pratiquent l’escalade. Ce sport est inscrit au programme obligatoire d’EPS du lycée en liaison avec les programmes nationaux et vise à développer la compétence : « maîtriser ses déplacements dans un milieu incertain, et maîtriser ses émotions ».
D’emblée l’enseignant constate que la très grande majorité des filles est en échec et renonce à s’engager physiquement, ou tout simplement capitule après quelques efforts.
Le constat est terrible et la conséquence, peut-être, pire encore ! Elles ne sont plus sur un pied d’égalité avec les autres élèves des classes de Première, qu’ils soient filles ou garçons, élèves qui eux (et elles) acceptent de s’engager dans un sport à risque mesuré.
Soyons clair, il ne s’agit nullement de mettre filles et garçons à égalité ou de leur permettre de vivre ensemble, de pratiquer un sport ensemble. Il s’agit avant tout de les mettre en action, en mouvement, pour que alors et alors seulement, elles expérimentent une pratique sportive qu’elles considèrent comme inaccessible et se donnent alors une chance de réaliser des apprentissages, d’acquérir et de valider des connaissances, de réussir des exploits pour être amenées à se prouver qu’elles peuvent justement apprendre, réussir et s’accomplir !

Extrait de l’article paru dans notre dossier 467
Face à l’incapacité de réussir du premier coup, filles et garçons ne partent pas à égalité. Doit-on pour autant accepter avec résignation ce qu’ils considèrent comme une fatalité ?
L’enjeu de ces neuf semaines ? Bien plus qu’une note au bas d’un bulletin trimestriel. L’enjeu véritable : réconcilier les élèves en difficulté ou en renoncement, avec la joie d’apprendre, la volonté de s’accomplir, en se dépassant, le bonheur de réussir, dans une relation à l’autorité plus sereine, autorité ici représentée par l’Enseignant, au sens aussi de « qui fait autorité dans son domaine ».
Neuf semaines de longue patience, où il faudra bouleverser un certain nombre de représentations, fausses ou inopérantes, pour ne pas dire dangereuses, quelquefois : comment porter un baudrier, sans céder aux caprices de la mode. Les vêtements « taille basse », induisent chez les élèves un baudrier porté « taille basse », ce qui pourrait mécaniquement conduire le grimpeur à se retrouver tête en bas en cas de chute !
Neuf semaines où il faudra persuader ou imposer, expliquer ou ordonner, dilemme habituel, pour l’Enseignant, mais totalement inacceptable pour l’élève en proie au renoncement : « Si je ne sais pas faire, je ne fais pas, si je vous dis que j’ai peur, vous n’avez qu’à me croire »
Neuf semaines ponctuées parfois d’énervements, de larmes, de coups de colères, de mots plus hauts que les autres (proche de l’insolence) de la part des élèves.
Neuf semaines ponctuées de petits pas en avant, ou en hauteur, escalade oblige, de sueurs chaudes, pour se prouver qu’on est capable de maîtriser ce qui peut faire si peur, que tout n’est pas définitivement fixé et que l’on n’est pas irrémédiablement enfermé dans son stéréotype.
Certains élèves l’ont dit par la suite : « Ce prof que je trouvais sévère, m’a donné des conseils, quand j’avais peur, et j’ai pu atteindre le sommet. C’est comme ça que j’ai compris que c’était pour m’aider, pour m’accompagner ».

Points soulevés dans la discussion

– La question de l’égalité filles – garçons a beau être un thème ministériel, elle reste largement ignorée. Les formations proposées trouvent peu d’écho.
Même dans les nos milieux, un atelier sur ce thème est en général moins prisé que d’autres. Nous ne sommes pas assez habitués à nous questionner sur nos propres conduites non conscientes. Savons-nous quelles différences de traitement nous faisons, en partie à notre insu, entre filles et garçons au quotidien dans la classe (regards, sollicitations, appréciations, types de tâches confiées…) ? il vaut la peine de nous interroger sur ce point, même si ce n’est pas facile à percevoir.

– Face aux inégalités, la tentation peut être l’évitement : cantonner chacun dans ce qu’il sait faire ou veut faire. Ou la compensation (modifier les barèmes… : pas si simple, à discuter ). Ou l’acceptation : puisque l’élève lui-même dit qu’il préfère avoir zéro, que faire ?
Mais certains établissements ou équipes, pour les inégalités filles garçons comme pour les inégalités d’apprentissage, décident de prendre la question de front. Ce sont souvent les équipes d’EPS. Témoignage d’une équipe d’EPS qui décide de vivre pour elle-même un cycle qu’elle prépare pour des classes, afin d’éprouver les émotions, goûts et refus auxquels les élèves seront confrontés. Cette expérience les amène, entre autres, à imaginer pour les diverses activités plusieurs entrées au lieu d’une.

  • Ce qui semble important c’est de créer de la culture commune ; tenir compte des différences ET « forcer » chacun à travailler sur ce qui n’est pas de sa compétence ou de ses goûts spontanés. Exemple des garçons pour qui la lecture est une affaire de filles. Créer cette culture aussi par la parole et l’échange, ou le jeu « psychologique » (Sandrine Marot, Le jeu des préjugés).
  • Il semble aussi important d’aller visiter les recherches des psychologues et ce qui est naturel en terme de comportement pour les filles et les garçons (Ex. Lesourd Serge in « filles garçons des rapports de genre à construire » – Profession banlieue). Les garçons sont dans le faire, l’action, du fait de leurs hormones, donc souvent dans l’agression verbale ou physique, les filles sont dans « le paraître » d’où le souci constant de leur apparence.

    Action financée par la Région Île-de-France
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