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Apprendre et enseigner pour favoriser la numératie

Les derniers résultats de la DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) portant sur l’évaluation des compétences des jeunes en numératie lors de la journée défense et citoyenneté[[ Éducation & formations, n° 88-87, mai 2015, p. 259-281.]] montrent que 9,7 % des jeunes ont des difficultés en numératie, autrement dit dans « la capacité de comprendre et d’utiliser des données mathématiques à l’école, au travail et dans la vie de tous les jours ». Certaines de ces difficultés sont de l’ordre de l’innumérisme contre lequel le ministère de l’Éducation nationale compte lutter en cette rentrée scolaire, en évoquant les programmes, la formation des enseignants, les apports de l’informatique et la nécessité de redorer l’image des mathématiques.

Difficultés d’apprentissage des nombres

Certains chercheurs évoquent l’influence des travaux de l’OCDE et les modalités d’évaluation des performances des élèves en mathématiques (PISA, TIMSS) pour expliquer l’usage de plus en plus fréquent de la notion de numératie dans les textes officiels.

Les recherches s’attachent à démontrer l’importance du développement de la perception des nombres dès le plus jeune âge. Les neurosciences, ou les psychocogniticiens, montrent que les bébés peuvent reconnaitre et comparer de petites quantités d’objets. Ensuite, dès la petite section de maternelle, elles mettent en avant l’importance de la mémorisation de la suite orale des nombres à travers les comptines ou la chaine numérique verbale.

Le monde des nombres est ensuite peuplé de chaussetrappes qui font que le chiffre 1 n’a pas le même statut selon qu’il exprime l’unité, la dizaine, la centaine ; que le nombre 78 ne s’écrit pas 6018, une des difficultés fréquemment observées, etc. Quand on passe aux opérations, on constate que le traitement de nombres à plus de deux chiffres pose problème, que certains enfants ont des difficultés à placer la retenue, que le traitement des opérations en lignes ou en colonnes peut induire telle ou telle difficulté, que la maitrise de la notion de partage ne signifie pas une compréhension ultérieure des fractions, que l’introduction des décimaux fait basculer la certitude qu’un nombre à quatre chiffres est forcément un grand nombre, que dire de 8 605 et 8,605 par exemple ?

Difficultés d’enseignement des nombres

Les enquêtes internationales (PISA et TIMSS) indiquent que la majorité des enseignants du premier degré n’a eu, au cours de sa scolarité, que peu d’appétence pour les mathématiques. Pour envisager sereinement un accompagnement des élèves dans cet apprentissage, il leur faut donc de la volonté, et, idéalement, une formation professionnelle et continue beaucoup plus robuste que celle qui est proposée actuellement. Les recherches en didactique ou en psychologie cognitive demeurent encore très complexes pour les enseignants. On constate que des évidences concernant l’apprentissage du sens du nombre et des techniques opératoires, le développement d’un regard critique sur les programmes scolaires ou les manuels, ou encore l’obligation de vigilance quant à la progression des apprentissages ne s’inscrivent pas forcément dans le développement professionnel des enseignants. Il s’agit pour eux d’assimiler des concepts, d’appréhender les difficultés potentielles des élèves, de créer des situations favorisant les apprentissages, le tout avec une formation initiale dans laquelle les mathématiques sont peu présentes (2 % des enseignants du primaire ont suivi un cursus universitaire en mathématiques) et une formation professionnelle dans laquelle l’enseignement des mathématiques peut ne représenter que vingt heures sur l’ensemble de l’année de M 1.

L’efficacité attendue des enseignants trouvera-t-elle des ferments positifs dans la prochaine conférence de consensus sur la numération[[Les 12 et 13 novembre prochains, le Cnesco et l’IFÉ organisent, à Paris, une conférence de consensus sur le thème « Nombres et opérations : premiers apprentissages », http://www.cnesco.fr/conference-de-consensus-numeration/]] ou dans l’accompagnement des nouveaux programmes de cycles ?