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Pour un collège utile à tous les élèves

Comment en êtes-vous arrivés à retenir le thème du collège, parmi bien d’autres chantiers à travailler pour faire progresser le système éducatif comme les procédures d’évaluation, le métier enseignant, etc. ?

L’agenda d’une organisation syndicale est trop souvent fixé par l’agenda ministériel. Or, cet agenda ministériel obéit à des logiques qui ne sont pas nécessairement en phase avec les besoins du système éducatif. En clair, les priorités ministérielles ne sont pas les nôtres, et nous avons décidé de ne plus être seulement réactifs, mais aussi proactifs.
Luc Chatel a focalisé son action sur le lycée qui, à notre avis, n’était pas le chantier à ouvrir en priorité pour faire progresser le système éducatif. Au SE-Unsa, nous soutenons depuis de nombreuses années que c’est sur la scolarité obligatoire que doivent porter en priorité les efforts de la nation, efforts budgétaires, bien sûr, mais aussi efforts pédagogiques pour atteindre l’objectif numéro un, qui est qu’aucun élève ne doit sortir du système éducatif sans diplôme. Nous soutenons la logique du « socle commun », dans le sens où nous pensons que l’école doit pouvoir garantir à tous l’acquisition d’un ensemble de compétences indispensables associant à la fois une culture commune et des capacités clés.
Or, c’est particulièrement au niveau du collège que cette logique du socle commun achoppe. Bien qu’elle soit affichée dans les textes officiels, elle prend insuffisamment corps sur le terrain. Le collège reste tiraillé entre deux logiques, celle de la sélection des élèves qui iront dans la voie générale du lycée (ce qu’il est de fait) et celle de la réussite de tous. Son identité reste instable et il fait régulièrement l’objet de débats.
Au SE-Unsa, nous sommes persuadés qu’il sera au cœur de la prochaine campagne présidentielle et au cœur des projets éducatifs des principaux partis politiques. Nous serons alors à un tournant capital. Soit nous opterons pour une « certaine diversification de l’offre de formation » au collège, comme l’a demandé le président de la République à son ministre récemment, c’est-à-dire que nous redonnerons une existence officielle aux filières différenciées au collège. Soit nous opterons pour une « formation plus diversifiée pour tous », comme le recommande le Haut Conseil de l’Éducation, c’est-à-dire que nous nous appuierons sur des contenus moins « académiques », faisant plus de place à des formes d’intelligence diverses et à des savoirs différents, pour former ensemble tous les jeunes au collège. C’est un choix fondamental qui aura des conséquences en termes d’efficience et d’équité de notre système éducatif, en termes de cohésion sociale également. Nous souhaitons peser de tout notre poids sur ce choix.
Lancer le débat sur le collège, c’est éclairer ce choix fondamental, mais c’est aussi en tirer les conséquences, sur les démarches pédagogiques, en matière d’évaluation et de certification, d’activités des enseignants, d’organisation de leur service. Sans oublier leur formation.

En quoi un syndicat est-il légitime pour ouvrir le débat sur cette question, qui dépasse très largement le problème des conditions de travail des personnels ?

Notre syndicat syndique des enseignants de la maternelle au lycée. Nous constatons que ce sont ceux qui enseignent en collège qui nous font le plus part de leur souffrance professionnelle. Notre rôle est de chercher avec eux à améliorer leurs conditions de travail. Et ceci ne se limite pas à des revendications catégorielles. Nous sommes convaincus que les enseignants en collège souffriront moins quand leurs élèves souffriront moins également.
Par ailleurs, le SE-Unsa s’inscrit complètement dans une filiation historique avec le SNI, promoteur de l’« école fondamentale ». Notre syndicat ne s’est jamais « contenté » d’assurer une défense catégorielle. Il s’est toujours impliqué dans la réflexion éducative et pédagogique, au service de la réussite de tous les élèves.

Pourquoi la forme du blog ? Comment sélectionnez-vous les contributions ?

Nous avons voulu que la réflexion que nous menons sur le collège soit ouverte à tous et que chacun puisse y apporter sa contribution. Ce dialogue avec la profession se nourrit des travaux d’acteurs du système éducatif, comme Roger-François Gauthier ou Jean-Paul Delahaye et va se nourrir des conclusions de réunions organisées localement par nos sections. Un colloque organisé le 12 janvier à la MGEN à Paris sera également un moment d’enrichissement de nos réflexions. Et nous publierons nos propositions au printemps 2011. Les contributions que nous avons reçues ne reflètent pas forcément complètement nos idées, mais elles sont toutes de qualité. Nous n’avons pas eu à effectuer de sélection.

Si vous aviez une idée à valoriser dans les premières contributions reçues ?

Il me semble que le point commun qu’on peut trouver à ces contributions, c’est qu’elles s’intéressent toutes aux élèves. Plus que le système, plus que les programmes, plus que les enseignants, elles prennent comme point de départ et comme point d’aboutissement de leur réflexion les élèves. Les acquis des élèves qu’on connait si mal avec notre évaluation-classement-sélection, le travail des élèves, trop souvent reporté en dehors de l’école, au risque de creuser les inégalités. Si ces deux dimensions étaient placées au cœur d’une réforme du collège, on pourrait alors réviser les contenus de formation, les démarches pédagogiques et les modalités d’évaluation pour faire du collège un lieu de formation pour tous où les savoirs retrouveraient leur sens et cesseraient d’être instrumentalisés au service de la sélection. Partir de la réalité des acquis des élèves, reconnaitre que les « contenus ambitieux » de nos programmes ne sont pas maitrisés en totalité par plus de trois élèves sur quatre, nous permettrait de briser un grand nombre de tabous en matière de contenus d’enseignement. On pourrait les redéfinir sans être systématiquement soupçonné d’abaisser le niveau ou de réduire les ambitions ! Au contraire, l’ambition serait alors bien plus élevée, puisque tous devraient acquérir ces contenus… Et si on place le travail des élèves, c’est-à-dire la transformation par eux-mêmes des contenus en connaissances et compétences, au cœur de l’organisation du collège, l’enseignant devient celui qui accompagne les apprentissages, qui est aux côtés des élèves et non pas face à eux. C’est toute la professionnalité des enseignants qui s’en trouve interrogée, et leur formation également.

Claire Krepper
Secrétaire nationale éducation du SE-Unsa

Programmation 2014-2015

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