Les Cahiers pédagogiques sont une revue associative qui vit de ses abonnements et ventes au numéro.
Pensez à vous abonner sur notre librairie en ligne, c’est grâce à cela que nous tenons bon !

Pour des politiques claires

Ce rapport part de l’hypothèse que les signes d’appartenance se multiplient selon une dynamique forte, et que l’école est fortement impliquée dans ce processus dont les formes sont beaucoup plus diverses et complexes “ qu’une certaine émotion médiatique autour du voile pourrait le laisser croire ” : l’absentéisme, le refus ou la contestation d’activités ou de contenus d’enseignement.

Les rapporteurs prennent la précaution d’insister sur le fait que le panel des établissements visités ne peut en aucun cas être considéré comme représentatif des établissements français mais bien plutôt de ceux qui recrutent dans des quartiers “ en souffrance et de souffrance ”, où la ghettoïsation est largement entamée. Ce faisant ils mettent en garde contre les risques de généralisation et donc de dramatisation qui pourraient être faites à partir de ce qui est observé.
Ces limites étant posées, le constat est assez dur avec l’école et son administration, (même si on reconnaît que certains font face avec efficacité). Citons quelques exemples sans hiérarchiser.

– Du côté des politiques, des hésitations et un “ balancier ” entre discuter/accepter et réprimer, qui a des effets désastreux.
– Une administration mal informée et focalisée sur la question du voile ; une absence totale de l’inspection sur ce terrain.
– Chez les enseignants, une absence de formation, voire une totale ignorance des faits religieux en particulier de l’islam, et une impréparation à répondre aux contestations ; chez certains, la tentation de théologiser la pédagogie et de dispenser eux-mêmes un enseignement religieux. De toute façon, désarroi et confusion sont fréquents.
– On constate souvent une résignation au recul de la mixité, avec proposition d’activités non mixtes, et surtout, ce qui paraît le plus grave, à tous les niveaux ces manifestations semblent être l’objet d’un refoulement, voire d’un déni général.

Ce qui paraît déterminant pour permettre de faire face, c’est la conviction et la résolution du chef d’établissement et des équipes, et le comportement des autorités académiques. Au-delà, les rapporteurs proposent que tout soit fait pour développer la mixité sociale des établissements, former et aider les enseignants à répondre aux contestations de leur enseignement, et piloter plus fermement l’action à tous les niveaux. L’école ne peut traiter seule ce problème, il faut que l’intégration sociale, culturelle et politique des populations issues de l’immigration soit l’objet “ d’un effort national soutenu et ciblé ”.

Pour terminer ce bref aperçu, deux phrases qui donnent le ton de ce rapport :
“ Il faut sortir d’une conception de l’action fondée sur l’évitement à tous prix des conflits et la crainte de leur médiatisation. Là où on a transigé, nous avons constaté les dérives les plus graves aux principes de la laïcité. Là où on a réussi, il n’y a jamais eu de transactions sur les principes ni de négociations sur les règles ; on a compris que l’une des conditions pour que l’école retrouve un rôle majeur dans l’intégration est qu’elle soit intransigeante vis-à-vis de tous ceux qui veulent en faire un lieu de discrimination, d’opposition et même d’affrontements entre groupes rivaux crispés de manière indépassable sur des origines ou des croyances naturalisées. ”

Elisabeth Thuriet


Le rapport de l’IGEN sur « Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires » est consultable en ligne et téléchargeable sur le site de l’Observatoire de communautarismes : http://www.communautarisme.net/biblio/rapport-obin-igen.pdf