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Partenaires pour lutter contre l’échec

Mouvement pédagogique et association d’éducation populaire, le CRAP [[Cercle de recherche et d’action pédagogiques, mouvement qui édite la revue les Cahiers pédagogiques.]] et les Cemea [[Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active.]] sont interpellés régulièrement par les problématiques éducatives. En promouvant la transformation de l’école pour viser celle de la société, des pratiques au service d’une éducation nouvelle qui valorise la reconnaissance de la personne dans toutes ses facettes, les deux structures accompagnent les militants pédagogiques et éducatifs dans leur volonté de voir se réaliser une école plus humaine et plus performante.

Or l’institution « Éducation nationale » est un des rouages d’un système infiniment plus complexe car politique, économique, juridique et social.

C’est dire que ces références-là pénètrent l’école et percutent les pratiques enseignantes qui vont dans le sens de l’ouverture de l’école sur le monde extérieur.

Conduire les adolescents et les enfants dès leur plus jeune âge vers leur propre construction, c’est les aider à bâtir des projets, à confronter leurs croyances et certitudes à celles des autres.

Du projet au partenariat, il n’y a qu’un pas que franchissent chaque année une multitude d’acteurs éducatifs dont quelques-uns se confient ici dans ce dossier.

L’expérience prouve que le partenariat ne s’invente pas, il s’élabore dans la visée de transformation des pratiques pour un enrichissement collectif. Les obstacles sont nombreux. Parmi les plus palpables, mais non des moindres, les territoires, tant dans le sens géophysique que politique ou mental, le partage des compétences (partie I).

F. Dhume met fort bien l’accent sur un des freins repérés, le constat de séparation radicale, qui empêche le travail en inter-institutionnel pour n’opérer que dans des espaces circonscrits. Or le processus de construction de partenariat doit abolir les murailles pour s’engager.

De la même façon, ce dossier propose une interrogation sur la place de l’école dans le partenariat (partie II) et dans la société, et du partenariat dans l’école. Tant que l’institution considère qu’elle est au centre et que ses partenaires gravitent autour, tant que des logiques de prestation de service et de sous-traitance sont à l’œuvre, la dynamique partenariale ne peut advenir.

Vous trouverez ci-après des illustrations encourageantes de partenariat établi où, sous la plume de S. Bec et R. Garassino, « le parrainage est devenu partenariat », sous celle de R. Corroyer, il y a « un contexte de connaissance et de reconnaissance mutuelle autour d’un projet commun et non d’actions juxtaposées ».

La dernière partie du dossier ouvre vers l’avenir : entre le pôle sanctuaire et celui d’école ouverte, le curseur doit trouver sa juste position dans un équilibre à chercher dans des adaptations locales toujours indispensables. Une des conditions de réalisation est la formation des acteurs (partie III). Puisque le partenariat ne s’improvise pas, il faut s’y préparer. Les exemples de formation initiale d’enseignants sont encore peu fréquents. Sur le premier axe, lors de formation par alternance, des pistes apparaissent telle « la formation à temps plein et scolarité partielle » des « maisons familiales et rurales ». Ce type de formation met en relation des écoles et des entreprises. Ces dernières se voulant coéducatrices tout en étant des « employeurs », nous touchons là aux limites d’une collaboration qui pose la question de la nature de la formation qui revient à l’école et aux entreprises lorsque les intérêts économiques sont en jeu. Mais nous avons préféré nous en tenir à l’expérience des « maisons familiales rurales » et réserver la réflexion sur les rapports entre l’école et l’entreprise à un autre dossier afin de privilégier ici un partenariat centré sur des objectifs éducatifs.

S. Cothenet, pour sa part, a étudié la formation des compétences collectives ; celle-ci devrait s’appuyer sur « une éthique professionnelle d’intervention », nous dit-elle avant de reconnaître que, même si on remarque que « là où il y a eu formation, on note une amélioration du fonctionnement des équipes », dans le domaine éducatif, « un travail important reste à réaliser en formation initiale ».

Enfin, c’est D. Zay, une grande spécialiste du partenariat éducatif aux niveaux français et international, qui refermera ce dossier avec le regard expert qui est le sien.

Trois parties composent donc ce dossier ; pourtant c’est une seule problématique qui l’anime : si le partenariat est un plus éducatif qui concourt à lutter contre l’échec scolaire comme l’affirme D. Zay en conclusion, comment le mettre en place dans l’école qui n’y consent qu’en occupant une position centrale ? Comment dépasser les obstacles que sont les enfermements des acteurs et quelle formation pour tous les personnels impliqués ?

Ces chapitres sont liés à tel point qu’il nous a été souvent impossible d’y placer des contributions d’auteurs en leur entier nous avons donc choisi de proposer des articles filés, d’un même auteur, sous forme de divers encarts tout le long du dossier.

La question du partenariat apparaît bien fortement liée à un objectif de transformation des pratiques, celui-ci étant freiné par des logiques de territoires, par des ancrages sur des positions rigides de place de l’école dans le cadre d’une politique éducative d’ouverture et, au final, c’est un déficit de formation des acteurs qui pénalise un développement plus ambitieux d’une dynamique partenariale.

Ceci est l’image négative que révèle la macrophoto de notre société éducative ; dans les pages qui suivent, c’est au plus près du terrain qu’un foisonnement d’expériences enrichissantes nous permet d’apporter un contrepoint microsociologique alimenté par le travail fécond d’équipes d’acteurs engagés.

Daniel Comte, membre du CRAP, responsable des politiques éducatives Cemea.