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Où l’enseignement est individualisé

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C’est la cinquième semaine de cours. Nous terminons le chapitre : circuit électrique en série. Les élèves savent ce que sont un circuit électrique, un court-circuit, le sens du courant, une boucle simple et ont identifié des transferts d’énergie dans des circuits. Intégré dans le dispositif de formation, ce TD/TP dure 1 h 30 et utilise des situations présentées habituellement aux élèves. Les élèves ont déjà été évalués deux fois : une interrogation et un devoir de synthèse. Ils repèrent à peine les compétences de leur livret. Ils ne peuvent anticiper ni s’auto-évalue spontanément. Une aide est encore indispensable.
C’est la troisième fois que nous travaillons à partir de symboles et la première que les élèves font l’association montage/schémas normalisés par eux-mêmes. Le degré d’abstraction de cette partie nécessite un va-et-vient entre le montage et sa représentation. Dans chaque atelier le matériel nécessaire est mis à disposition des élèves.

Les compétences travaillées

– Des compétences spécifiques à la partie étudiée

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– Et des compétences communes à toutes les parties et/ou à d’autres disciplines.

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Les activités proposées

Je me suis inspirée de la taxonomie de Bloom[[Site canadien Erudium : la taxonomie de Bloom.
http://www.erudium.polymtl.ca/html-fra/education/education4d.php
]] indiquant cinq niveaux d’acquisitions d’une compétence et de la technique de l’apprentissage autorégulé[[Ph. Dessus, IUFM Grenoble : l’apprentissage autorégulé.
http://webu2.upmf-grenoble.fr/sciedu/pdessus/sapea/autonomie.html
]] qui précise que les élèves doivent contribuer de manière active à la fixation de leurs buts d’apprentissage et à la planification de la manière dont ils vont s’y prendre pour y parvenir. Les activités des cinq ateliers en tiennent compte.

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Choix des ateliers par les élèves

En début de séance, je remets le résultat de l’évaluation effectuée précédemment. Ils relèvent les résultats en termes de compétences dans leur livret. Ils s’auto-évaluent sur celles qui seront travaillées dans la séance mais qui n’ont pas été testées. Après la correction certains peuvent juger qu’ils ont compris leurs erreurs et ils indiqueront que la compétence est acquise. Enfin, ils listent les « non acquises » et hiérarchisent les trois qu’ils travailleront. Cet engagement personnel dans la tâche est un moment crucial, à ne pas occulter.

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Organiser les rotations

Je projette le plan de la classe indiquant la disposition des groupes et en précisant que les plus faciles sont en vert. J’insiste sur le fait que la connaissance des symboles est indispensable pour l’électricité, que l’essentiel est d’y arriver.

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Dans chaque lieu, il y a :
– Une feuille d’émargement afin que je puisse garder une trace du travail effectué pas chacun.
– Un paquet de 20 photocopies, en libre-service, décrivant le travail à faire.
– Un protège-document dont la tranche est fixée par du papier collant sur la table et contenant au verso : les réponses. Je n’ai pas à faire de correction, et peux me consacrer à l’aide et à la gestion de la classe.

Il n’y a pas de règle générale, quand un groupe a fini, les élèves (individuellement) vont vers le deuxième poste choisi.
Un nouvel élève est arrivé ce jour-là, je l’ai placé aléatoirement.
Les élèves ont fait deux postes au maximum. Ils ont tous commencé par les plus faciles.

Vécu des élèves et gestion de l’hétérogénéité

Je prends cinq minutes en groupe classe pour que les élèves fassent le bilan de ce qu’ils ont travaillé et compris. Ils doivent considérer cette séance comme du travail et non du jeu.
J’ai constaté que les élèves sont tous concentrés. Il n’y a pas de dérive bavarde. Ils réussissent tous à acquérir au moins une compétence. Ce sentiment de progrès est moteur dans la suite de l’apprentissage. Je ne reçois plus aucune copie blanche. Il n’est pas rare que même les plus faibles me demandent comment faire pour en acquérir. L’élève devient acteur de son apprentissage. Le professeur est vu comme une aide.

Je continue à avoir des élèves plus compétents que d’autres : comment gérer cette hétérogénéité ?
Tout d’abord, je me fixe une limite dans le temps et je me contrains d’arrêter là, quel que soit le niveau de mes élèves. D’autre part, j’ai conservé un tiers de temps et je peux maintenant fixer individuellement des objectifs précis. Par exemple, à la fin de la séance un élève n’a que la connaissance des symboles et mon objectif est qu’ils aient tous atteint le niveau 3. Je vais, tout en continuant le cours sur d’autres notions, inciter l’élève à savoir faire un schéma d’un montage et inversement. Je lui fixe cet objectif, et lui seul, dans l’activité proposée. Puis, toujours sur des notions nouvelles, je fixe un autre objectif, etc. Le niveau fixé doit être réaliste. Mes activités reprennent donc des compétences travaillées antérieurement jusqu’à ce que tous y arrivent.
Et si certains n’ont toujours pas acquis ce niveau ?
Il ne m’en reste généralement qu’un ou deux et, souvent, ils ont beaucoup de soucis par ailleurs, la seule solution est de travailler individuellement. Une demi-heure suffit. S’il refuse, je ne ressens aucun sentiment d’échec, ce n’est pas de ma faute. Il faut faire appel à des spécialistes, ce n’est plus de mon ressort.
L’avantage indéniable, c’est qu’ils arriveront en 4e, avec tous un minimum. Sans pénaliser les plus forts, les élèves les plus faibles cessent d’accumuler les « manques », ils bâtissent.

Ce travail considérable n’est pas à faire à tous les cours, il faut traiter au préalable les deux tiers de l’enseignement. Je fais trois séances dans l’année une pour chaque partie : matière, lumière et électricité. Les mêmes fiches servent d’une année sur l’autre. Les élèves prennent à la fois conscience de leurs lacunes, des progrès accomplis et de ceux qui restent à faire. Peut-être serait-il intéressant de finir le tiers restant dans ce type d’organisation ? C’est à tester…

Nadège Bigot, professeur de physique chimie au collège G. Texier à St Jean d’Angély (17).
Membre du groupe Apprendre Aujourd’hui de l’académie de Poitiers
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