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Maman d’enfants à la scolarité atypique

Nous avons été confrontés une première fois au besoin d’adaptation lorsque notre benjamin en CE2 s’est vu empêché d’écrire suite à plusieurs luxations du poignet. Sans matériel informatique pendant deux années, il dictait à un camarade. Aujourd’hui lycéen, s’il maitrise parfaitement l’outil informatique, il n’en est rien de la rédaction. Il a raté une période importante de ses apprentissages.

En 2008, notre ainée était en terminale quand nous avons dû faire face à une dégradation brutale de son état de santé avec une perte importante d’autonomie et des souffrances difficilement gérables complétées par une somnolence intempestive, au point que nous doutions qu’elle puisse finir son année. Apprenant ses difficultés, la proviseure de son lycée s’est démenée pour qu’elle continue, achetant le matériel nécessaire, se battant contre des enseignants qui n’acceptaient pas ses retards (car l’entre-deux-cours était trop court), ni qu’elle fasse des photocopies ou accède à l’ascenseur… Elle a aussi obtenu une dispense d’assiduité. Les réflexions et petites phrases étaient nombreuses, blessantes, de professeurs comme d’élèves. Il n’est jamais facile d’être pionnier.

Mention très bien

Elle a réussi son baccalauréat à quelques dixièmes de la mention très bien. Pour sa prépa scientifique, des professeurs ont été formidables même si les réticences ont d’abord été nombreuses. Après avoir réussi ses premiers concours, il lui a été dit maladroitement qu’elle le devait à ses camarades. Blessée, et parce qu’elle a toujours voulu être médecin, elle décidait de cuber et de mener prépa et PACES (études de médecine) en même temps. Personne, hors de la famille, n’avait connaissance de ce double cursus. Pendant cette année de travail très intense, j’ai assuré son secrétariat pour les cours de médecine. Elle a réussi sa PACES et l’intégralité de ses concours. Elle a choisi de poursuivre dans une grande école parisienne et a reçu les félicitations de tous à l’annonce officielle des résultats de son parcours atypique. Pendant ces années post-bac, nous avons dû affronter plus d’un service administratif. Entre le théâtre tragi-comique et le délire kafkaïen de l’organisation universitaire, nous étions très loin des clichés affichés. Nous aurions aimé que ces expériences servent mais personne ne semble intéressé par le sujet. Malgré cela, elle a terminé brillamment son master et poursuit son cursus. Elle a réussi ce qu’elle voulait et où elle le voulait. J’avoue une immense admiration pour son courage et sa volonté. Je remercie encore la proviseure pour sa confiance. En 2013, sa sœur est entrée dans le même lycée, nous ne pouvons que constater le chemin parcouru par l’ensemble de l’équipe éducative, il reste toutefois un point noir : l’accessibilité.

Notre cadette, EIP (élève intellectuellement précoce), a eu une scolarité catastrophique en primaire. Exclue en petite section de son école maternelle « parce qu’on n’aime pas les singes savants », constamment brimée à son retour à mi-temps en grande section. J’ai été convoquée pour entendre qu’elle n’irait pas en CP car « les maitresses n’aiment pas les enfants comme elle ». Il faut dire qu’elle avait un humour très décalé, savait lire, écrire et connaissait les quatre opérations, elle les avait comprises seule en regardant une horloge. La psychologue scolaire rencontrée ne l’a ni regardée ni interrogée, elle prétendait que nous faisions de l’élitisme. En élémentaire, notre fille avait fini par n’aller en classe qu’à temps partiel. Elle a été soigneusement ignorée et a définitivement adopté une posture effacée, devenant invisible. Comme beaucoup, elle avait sauté le CP, en CM2 la psychologue privée nous conseillait deux sauts supplémentaires qu’elle a fermement refusés. Notre fille a été fragilisée par l’école, elle en est devenue dépressive. Sa scolarité a été très douloureuse.

Catherine