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Les suites d’un atelier des Rencontres d’été du CRAP

Un peu de bricolage pour différencier l’évaluation et tenir compte des rythmes d’apprentissage

Ma façon de faire que l’hétérogénéité apporte à tous, est d’instituer le travail en groupe d’entraide. L’expression, la confrontation et la mise en commun des différentes procédures et rend possible à chacun d’avancer à son rythme, d’autant que je donne souvent des fiches à exercices multiples dont le minimum exigible doit être fait par tous. Par contre, les évaluations sont individuelles et communes ?
Cette année, je me suis engagée à essayer de tenir compte, dans les évaluations, des différences de rythme dans les apprentissages. Avant chaque contrôle, j’ai l’habitude de distribuer une fiche de savoirs et savoir-faire détaillée, que les élèves utilisent avant le contrôle pour réviser et après, pour évaluer leurs réussites et leurs échecs. Cette année, j’ai décidé d’ajouter une partie différenciée : chaque élève doit inscrire un sujet qu’il s’engage à retravailler pour le ré-évaluer au contrôle suivant. Celui-ci comporte donc en plus des exercices communs, une liste d’exercices (sur 2 ou 3) différenciés.
Force est de constater que peu d’élèves ont relevé l’enjeu. Il y a 3 semaines entre deux contrôles, et même si ceux-ci sont retravaillés en devoir maison en utilisant les cahiers, ainsi que mes annotations, les engagements spécifiques ne sont pas tenus. Il vaudrait sans doute mieux programmer un petit contrôle différencié, directement une semaine après, les élèves maîtrisant mieux une projection à plus brève échéance que les 3 semaines habituelles.
Cette proposition est confortée par le fait suivant : en cours d’apprentissage d’une notion, je fais faire des tests réguliers dont les mauvaises notes ne comptent pas s’il y a progression au contrôle suivant. Les sujets de difficultés semblent mieux identifiés, moins noyés dans la masse d’un gros contrôle.
Le travail sur le sujet n’est pas terminé et je ne renoncerai pas sur le chemin de l’autonomisation des élèves, car il est essentiel.

Sylvie Menet, professeur de mathématiques en Loire-Atlantique.


Une correction qui serve à quelque chose

Je m’étais engagée à prendre enfin le temps de faire une correction « intelligente » en technologie, ma matière. J’ai choisi des activités autour de notions fondamentales comme savoir s’organiser dans le temps ou représenter des données chiffrées sous forme de graphique.
J’ai pour les exercices, repris toutes les propositions données par les élèves, je les ai saisies et photocopiées. J’ai constitué 4 groupes de 5 élèves, avec dans chaque groupe, un élève qui avait « réussi » les exercices et était « chef d’équipe ». J’ai remis à chaque chef de groupe les photocopies et ai donné une seule consigne : « vous n’aiderez les autres qu’en leur posant des questions comme : à quoi tu vois que la proposition B est fausse ? Je n’étais que garante du dispositif.
Très vite, j’ai vu que ça travaillait bien, dans la bonne humeur. Ceux qui avaient compris étaient coincés de ne pouvoir que poser des questions pour faire comprendre aux autres. Lors de la mise en commun, un élève de l’équipe 1 annonçait le numéro qu’il voulait commenter. Si son commentaire était exact, je coloriais la case de sa couleur (chaque groupe avait la sienne), sinon l’équipe suivante avait la parole. Le but était d’avoir le plus de cases coloriées contiguës. Chacun dans le groupe devait s’exprimer une fois. Là aussi j’ai noté une bonne écoute de l’ensemble de la classe : miraculeux ! Beaucoup d’élèves me semblait avoir compris (on le voyait aux explications qu’ils donnaient en justifiant le fait que telle ou telle proposition était fausse.
Le seul point négatif, c’est la quantité de travail que ça demande au professeur, qui n’est pas en plus réinvestissable, puisque ce sont les propositions des élèves que j’ai prises et qu’il faudrait reprendre me semble-t-il, l’année suivante…

Monique Ferrerons, professeur de technologie à Lyon.


Des groupes, dès la rentrée

A la rentrée, j’ai instauré d’emblée un dispositif « travail de groupes ». Ainsi, en cinquième, mes élèves ont commencé à travailler sur la recherche de verbes décrivant ce qu’on fait quand on fait des mathématiques (après un moment individuel) et en quatrième, ils ont répondu à la question : pourquoi à votre avis vous fait-on faire des maths, ainsi qu’à tous les jeunes dans les écoles du monde entier ?
De même demandant dès le premier cours de 4° de remplir une fiche diagnostique sur les relatifs, j’ai bien précisé qu’il ne s’agissait pas de juger les élèves, que je les prenais là où ils étaient, que je faisais surtout un état des lieux pour prévoir le cours suivant, en sachant aussi que certains ont besoin de temps pour relancer la machine en début d’année… J’ai « corrigé » en mettant une lettre entre A et E, et en évitant le C trop facile. Et à partir de là, j’ai constitué des groupes selon des critères très différenciés.
– quelques groupes hétérogènes qui pourraient se débrouiller sans moi car leurs erreurs étaient complémentaires, dont devraient vite sortir quelques « bons » qui pourraient alors aider d’autres groupes
– un groupe homogène faible (aucune bonne réponse) pour qui tout est à reprendre, que je vais garder près de moi
– un groupe d’élèves qui avaient très peu avancé en quantité, et avaient donc besoin de plus de temps, mais paraissaient bien partis.

Martine Belmont, professeur de mathématiques dans la Drôme.


Mais le temps, le temps…
J’ai essayé une fois de mettre en oeuvre le protocole (évaluation formative)que j’avais élaboré aux Rencontres.. Mais, même si ça m’a semblé générer des échanges riches, cela a pris tellement de temps que nous n’avons pas fini la correction dans l’heure, sans parler de faire une mise en commun. D’autre part, dans certains groupes, le « bon » était incapable de formuler les questions pouvant amener les autres à trouver la solution. Je suppose que cela demande un entraînement que je n’ai pas le temps de leur fournir (je ne les vois qu’une ou deux fois par semaine, et je les entraîne déjà à « rédiger la trace écrite du cours » ; « réaliser un schéma fonctionnel » et quelques autres compétences techniques). Il me faut donc choisir, à mon grand dam…

Marie-Pierre Gustau, professeur de SVT en Loire-Atlantique.


Copies colorées, devoirs améliorés

Voici une expérience tentée en quatrième et qui me semble avoir fonctionné :
les sujets de rédaction en LV1 sont souvent des sujets de synthèse des notions apprises. Or, c’est bien ce stade-là qui fait échouer certains élèves car ils ne font pas le lien entre ce qu’ils ont appris pendant la séquence et ce qui leur est demandé d’écrire.
Le sujet est donné en classe (ton portrait, ton village, une biographie…). Les élèves disposent d’outils : cahier, livres, dictionnaires, fiches de révision… Nous élaborons les critères de réalisation et de réussite ensemble (c’est assez rapide si les élèves savent déjà de quoi il s’agit) et ensuite mise au travail.
A la fin de l’heure, ils me rendent un brouillon que je corrige selon un code que nous avons établi (couleurs différentes selon domaine d’erreur, facile avec les surligneurs aujourd’hui, c’est joli, ça donne des copies plutôt bleues, ou plutôt orangées… Les élèves voient ainsi au premier coup d’œil dans quel domaine ils ont échoué). J’évalue leur travail. Parfois, le devoir est quasiment fini, pour d’autres, il n’y a que quelque lignes, voire quelques mots. Je sais aussi (c’est écrit sur leur brouillon) quels documents ils ont utilisés. C’est intéressant pour revenir avec eux dans la deuxième partie sur l’origine des erreurs (mauvaise utilisation du dictionnaire, par exemple). Je relève quatre ou cinq erreurs différentes et quelques phrases ou tournures jugées intéressantes ou pertinentes, dans des domaines variés, si possible (présentation / vocabulaire / grammaire / syntaxe / cohérence / articulations / orthographe). Les élèves peuvent faire des recherches supplémentaires chez eux.
Au cours suivant, analyse des phrases relevées en grand groupe. Puis possibilité pour les élèves d’améliorer leur devoir en groupe de deux ou bien dans le cas d’élèves qui ont peu d’erreurs d’être « assistant », c’est-à-dire de jouer le rôle de conseiller auprès des groupes de deux (aide à la recherche seulement : par exemple repérer dans la trace écrite du cours des éléments qui peuvent être utilisés dans la correction / réécriture). Les élèves disposent d’une fiche sur laquelle sont listées les compétences liées aux critères d’évaluation et où ils se situent. Quand l’heure est terminée, le devoir final est rendu et sera (ré)évalué.
A noter : cela fonctionne bien avec les élèves en difficulté qui sont ainsi plus motivés et les bons élèves qui apprécient de participer à la progression de leurs camarades. Ils m’ont dit également apprécier le fait de devoir discuter des erreurs. Un autre point positif qui est ressorti est la prise de conscience de la nécessité de l’effort pour réussir : la réussite de chacun devient possible. Par contre, certains élèves choisissent de garder leur note et se contentent de recopier leur devoir sans forcément l’améliorer : un dix ou un onze au départ leur suffit ! Dans ce cas, un travail coopératif est donné (affiche à partir d’extraits des meilleures productions / fiche de conseils pour le prochain devoir).
De mon point de vue, ce que j’apprécie le plus c’est de faire inter-agir des élèves très différents, de constater leur volonté de progresser ensemble : des liens sont ainsi créés et l’ambiance de travail s’en trouve considérablement améliorée. Le fait d’afficher en classe les productions de ceux qui le souhaitent aide aussi beaucoup au changement de regard sur l’autre, sans compter qu’ils lisent alors beaucoup plus volontiers en langue étrangère !

Sylvia Arlettaz, professeur d’anglais à Argelès sur mer.


Gérer l’hétérogénéité
Sur quoi on peut agir

– Définir des objectifs précis pour chacun, des compétences à atteindre , définies le plus précisément possible (ce qui n’est pas fait malheureusement dans le texte sur le « socle commun »)
– Organiser la confrontation « cognitive » entre élèves (par exemple lors de débats scientifiques)
– Utiliser la diversité des compétences et des savoir-faire, des stratégies utilisées par chacun…
– Laisser de temps en temps des marges de choix (entre activités, entre méthodes) aux élèves, et accepter que ce choix nous « surprenne » (certains choisissent la facilité, d’autres le défi : c’est aussi légitime l’un que l’autre ; il faut jouer le jeu du choix !)
– Admettre des voies imprévues pour apprendre
– Impliquer tous les élèves dans des projets collectifs, à côté par exemple de groupes de besoin, avec des moments d’auto-contrôle par le groupe lui-même.
– Répartir les rôles dans la classe (certains aident, mais ce ne sont pas toujours les mêmes ; partage de responsabilités…)
– Rythmer différemment (il y a des moments intenses, rapides, d’autres plus lents où on a tout son temps….)
– Faire chercher chacun et réussir à convaincre les élèves de la nécessité de le faire
– Organiser des « rituels »de passages d’élèves (tours de parole par exemple)
– Varier consignes et tâches, afin que tout le monde s’y retrouve
– Travailler à ce que les élèves puissent repérer tout autant leurs atouts que leurs difficultés
– Prévoir dans certaines activités des « jokers » utilisables à la demande (fiches d’aide, possibilité de ne pas traiter telle question…°
– Faire écrire par les élèves des « justifications » et valoriser l’expression de celles-ci
– Donner des tâches spécifiques à des élèves plus forts dans les groupes de travail (par exemple questionner les autres au lieu de leur répondre)
– Savoir guider les choix quand il le faut (ce qui ne veut pas dire imposer)
– Donner l’occasion aux élèves d’échanger sur leurs méthodes
– Demander aux élèves de formuler des tâches, par exemple des propositions de productions d’écrit à partir de telle leçon ou de tel texte.

Document produit par l’atelier