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Les STG : un analyseur ?

Une réforme des lycées se prépare.
Certains de ses aspects concernent directement ou indirectement la nouvelle filière « sciences et technologies de la gestion » (STG), héritière des « sciences et technologies tertiaires » (STT). C’est ainsi que sont notamment prévus : un bac pro en trois ans, le réaménagement des classes de 2de de détermination, ainsi qu’une expertise de la filière « économique et sociale » (ES), objet de vives attaques récurrentes. L’économie enseignée y serait très « idéologique » (et donc très critique…), et oublierait l’entreprise… Or, ces critiques qui viennent d’économistes « libéraux » et des milieux patronaux du Medef semblent ignorer totalement que des objets d’enseignements scolaires liés à l’entreprise sont présents en SES et surtout qu’ils sont omniprésents en STG ainsi que dans les sections tertiaires des lycées professionnels !
Les STG, réformés en 2005, ne seraient donc pas encore perçus comme des enseignements économiques à part entière… Pourtant, les objectifs de la réforme devraient permettre à cette filière d’accéder à cette reconnaissance. Il s’agit en effet de préparer les élèves à la poursuite d’études supérieures juridiques, économiques et de gestion, et de démarquer la voie STG des filières plus strictement professionnelles. On y a clairement affirmé des objectifs de réussite scolaire et universitaire, d’efficacité et d’efficience dans un environnement scolaire concurrentiel. La réforme, préparée par l’inspection générale et par des groupes d’experts, menée en large concertation avec les enseignants a été mise en place à partir de la rentrée 2005. La première session du bac STG a eu lieu en juin 2007.
Cette filière regroupe le plus grand nombre d’élèves des enseignements technologiques. Elle est « en concurrence » avec la filière générale ES et les filières professionnelles tertiaires. La « rénovation » STG, dont la réussite n’est pas encore avérée, pourrait contribuer à éclairer de nombreuses questions que se posent les acteurs de l’éducation qui voudraient faire évoluer le système vers plus de réussite, de démocratie, de transparence…
On trouvera d’abord dans ce dossier des articles qui posent à la réforme un certain nombre de questions urgentes : pourquoi avoir abandonné les STT ? Comment met-on en place la nouvelle filière et son baccalauréat ? Anne-Sophie Grossemy ou Gérard Barrère, par exemple, nous disent le nouveau regard qu’il faut porter sur cet enseignement et les bénéfices qu’on en attend. Christine Vielet et Damien Meunier précisent, eux, les huit passages pédagogiques obligés pour la réussite des élèves. Emmanuelle Brossais et Nathalie Panissal examinent comment les nouvelles orientations des programmes sont prises en compte dans les manuels.
Mais loin d’être unanimement approuvée, cette réforme laisse perplexes les acteurs du terrain, qu’ils soient enseignants ou formateurs. Ainsi Sylvie Cordesse Marot répond aux griefs faits aux STT, et elle voit dans la réforme une entreprise dangereuse et élitiste qui va fragiliser encore plus l’avenir d’élèves démunis socialement et économiquement. Car parallèlement, le ministère supprime des postes et des classes, et diminue les horaires des enseignements… Bien que Pierre Vinard ne soit pas du même avis, Nathalie Richit nous montre que les résultats de la première session du bac en juin 2007 n’ont pas calmé les inquiétudes.
Nous avons voulu voir ensuite, au cœur des classes, comment les professeurs vivaient concrètement cette réforme. Nous avons interrogé non seulement les disciplines d’économie-gestion, mais aussi les mathématiques ou l’histoire-géographie. Et nous nous sommes demandé s’il y avait une « spécificité » STG pour ces matières générales.
Par ailleurs, Françoise Bessette-Holland montre comment, avec les programmes rénovés, un nouveau champ disciplinaire remplace l’enseignement de l’économie d’entreprise : le MDO, ou « management des organisations »… (Sur notre site, on pourra lire, de Sylvie Cordesse Marot encore, une séquence pédagogique très détaillée de MDO en 1re sur la motivation des salariés dans l’entreprise).
On trouvera aussi dans ce dossier, avec Hélène Paché, le témoignage d’un lycée de Vitrolles (Bouches-du-Rhône) où les équipes pédagogiques, appuyées par la direction, se sont mobilisées avec beaucoup de volontarisme pour que les élèves réussissent.
Enfin, Fanny Olivier nous dit comment, à partir des méthodes de la pédagogie inductive, il est essentiel d’amener les élèves à conceptualiser, compétence majeure pour des études supérieures futures. Mais cette réorientation centrale des STG est loin d’être aisée et évidente. Elle est peut-être même, selon certains, une mission impossible…
Cette rénovation s’inscrit dans la situation des enseignements technologiques encore trop dévalorisés en France. On trouvera sur le site, par la professeure italienne Doris Valente, un tour d’horizon de ce qui se fait dans les principaux pays européens pour l’enseignement économique.
Les articles réunis ici traitent de questions qui sont transposables à d’autres filières et d’autres niveaux de notre système scolaire et ils peuvent ainsi contribuer à la réflexion et à l’action.

Alain Legardez, Enseignant-chercheur en sciences de l’éducation, responsable des formations en économie-gestion
à l’IUFM d’Aix-Marseille-université de Provence
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Raoul Pantanella, Professeur honoraire de lettres, membre de la rédaction des Cahiers pédagogiques.