Les Cahiers pédagogiques sont une revue associative qui vit de ses abonnements et ventes au numéro.
Pensez à vous abonner sur notre librairie en ligne, c’est grâce à cela que nous tenons bon !

Le cerveau et les apprentissages

Coordonné par deux chercheurs du Laboratoire LaPsyDÉ de l’université Paris-Descartes, cet ouvrage présente la particularité de rassembler trente experts issus d’univers variés pour traiter des grandes thématiques sur le cerveau et les apprentissages. Il est structuré en trois parties, lesquelles se déclinent en différents chapitres, complétés et illustrés par des focus.

La première partie contient un chapitre fondateur qui s’intitule Apprendre avec ses neurones, (Jean-Pierre Changeux), suivi de trois autres chapitres qui abordent des domaines didactiques ciblés sur le cœur du programme scolaire : Lire (Johannes Ziegler et Anaïs Deleuze), Écrire (Michel Fayol), Compter et raisonner (Olivier Houdé).

À la lecture de ces chapitres très documentés et très riches en conseils, on s’aperçoit que l’avancée des techniques d’imagerie permet une observation et des mesures de plus en plus fiables sur l’activité du cerveau. Celles-ci amènent les chercheurs à ne plus se contenter seulement de comprendre le fonctionnement du cerveau, mais de comprendre comment ce fonctionnement se développe, et comment les apprentissages peuvent influencer ce fonctionnement.

La seconde partie de l’ouvrage traite des grandes fonctions qui se situent en filigrane de tous les apprentissages. On y trouve un chapitre sur l’attention (Jean-Philippe Lachaux), un autre sur les différents types de mémoire qui interagissent (Francis Eustache), puis sur les trois fonctions exécutives principales de notre cerveau que sont la mémoire de travail, l’inhibition et la flexibilité cognitive (Grégoire Borst).

Si Lire, écrire et compter s’inscrivent dans un processus d’apprentissage que personne ne démentira, « on vient à l’école pour apprendre à lire, à écrire et compter », les grandes fonctions précédemment nommées ne font (malheureusement) pas l’objet d’un apprentissage explicite par les enseignants, en dépit des recommandations institutionnelles déclinées dans le domaine 2 du socle commun et dans les programmes. Ces trois neuroscientifiques démontrent par des exemples précis qu’apprendre à se concentrer, à mémoriser, à inhiber à l’école… commence par une connaissance des mécanismes de ces fonctions par les enseignants pour eux-mêmes. Ces prises de conscience débouchent sur un meilleur accompagnement de leurs élèves en classe, en termes d’observation et de réponses à leurs besoins, dans le but ultime d’optimiser leur rapport à l’environnement, aux autres, mais aussi à eux-mêmes.

De ceci résulte un chapitre menant à une réflexion sur la métacognition (Joëlle Proust), processus permettant à chacun de contrôler et évaluer ses propres activités cognitives, mais aussi sur l’auto-évaluation, suivie de propositions de pistes pédagogiques pour motiver les élèves à apprendre.

La troisième et dernière partie de l’ouvrage présente quelques exemples d’applications pédagogiques déduites des neurosciences cognitives à l’école, au collège et au lycée. Ce sont les dispositifs Cogni’classes (Jean-Luc Berthier), la Main à la Pâte (Elena Pasquinelli), la communauté pédagogique Lea.fr (Pascaline Citron et Marie L’Etang), le centre de référence pour l’évaluation de l’enfant en difficulté (Hervé Glasel).

Sans viser l’exhaustivité, on peut relever quelques points communs entre tous ces dispositifs, auquel on peut ajouter ATOLE (ATtentif à l’écOLE); déjà présenté dans les Cahiers.

Un premier point commun se repère au niveau de la composition des groupes d’acteurs : chercheurs en sciences cognitives et en didactique, enseignants, personnel d’académie et de centres supérieurs de formation, mais aussi des responsables d’édition.

De celui-ci découle un second point commun qui prouve que la recherche n’a de sens que si des allers-retours entre les laboratoires et les classes sont effectifs, dans la logique d’une véritable horizontalité, d’une reconnaissance de chacun, et d’une coopération (dans le sens de complémentarité) entre tous les acteurs.

Un troisième point commun de ces dispositifs montre que la recherche scientifique pédagogique collaborative permet une meilleure compréhension de soi et des autres, incite à travailler en équipe dans les établissements, et débouche sur une prise de conscience et une envie de revisiter ses pratiques et postures enseignantes.
Enfin, les focus rédigés par des chercheurs de renommée internationale et appréciés du monde de l’éducation, font preuve d’une remarquable capacité de synthèse par leurs auteurs, dans le but d’apporter un éclairage complémentaire et saillant à chacun des chapitres.

De par la diversité des acteurs qui le composent et des thématiques abordées, cet ouvrage offre à chaque lecteur de quoi actualiser ses connaissances scientifiques, didactiques et pédagogiques, dans la perspective de pouvoir s’engager dans des démarches d’innovation pédagogique visant à l’amélioration de ses pratiques, au service de tous les élèves.

Bénédicte Dubois