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La pensée extrême. Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques

L’auteur , reconnu comme l’un des plus éminents spécialistes des croyances collectives, nous propose l’actualisation d’un ouvrage paru il y a quelques années en intégrant l’écho d’événements récents qui confortent sans doute les thèses exposées ici. Il s’agit d’une tentative, très étayée par de nombreux cas concrets, de compréhension des mécanismes qui mènent à une radicalisation dont on connait tous les dangers. Et pour l’auteur, il faut se défaire de l’idée commode que le comportement des « radicalisés » est une sorte de « folie »; bien au contraire, il est plutôt question d’une logique poussée jusqu’à l’extrême justement, intransigeante et absolutiste, qui va contre le pragmatisme qui nous conduit à des arbitrages raisonnables entre des valeurs en tension. Bronner souligne le niveau élevé d’instruction de beaucoup d’extrêmistes. Ce n’est pas ignorance qu’ils commettent des actes criminels, mais parce que pour eux, la fin justifie toujours les moyens et, comme l’assassin de Rabin par exemple, on tue « pour le Bien ». La déradicalisation est très difficile et l’auteur met en garde contre les solutions simplistes qui ne marchent pas, d’autant que les extrêmistes sont préparés à argumenter et contre-argumenter pour anticiper les tentatives de leur faire changer de point de vue. Notons toutefois que l’auteur fait bien la différence entre idées extrêmes relativement inoffensives (il cite de curieuses obsessions, tel ces idolâtres de Johnny Halliday ou Marilyne Monroe) et celles qui mènent jusqu’au terrorisme. Dans tous les cas, les adeptes trouvent plus de sens à leur vie, deviennent « quelqu’un » croient-ils en même temps qu’ils deviennent pourtant les esclaves d’idées absolutistes et de chefs charismatiques.

Il n’est pas question de l’école dans cet ouvrage, mais on peut voir tout l’intérêt que cette étude peut avoir enseignants, qui ont tous en charge une responsabilité en matière d’éducation morale et civique et de formation à l’esprit critique. D’autant que certains d’entre nous se trouvent confrontés, ou se trouveront confrontés à des alertes de dérives extrêmistes chez leurs élèves et qu’il faut trouver les réponses adéquates, en comprenant, même si c’est difficile, la logique à l’œuvre, un rationalisme perverti et une adhésion fanatique à des valeurs , sans contrepoids. Rude tâche !