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«La littérature n’est plus le seul vecteur d’apprentissage du français»

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Pouvez-vous nous présenter les grands axes de ce dossier ?
Bien qu’il ait été programmé largement avant que soient connus les contenus de la réforme du collège ou de la refonte des programmes, ce dossier peut apporter des éléments de réponse aux questions que les collègues se posent depuis leur parution.

Dans la première partie, on trouve des réflexions et des expériences autour des « Langages pour penser et pour communiquer » qui sont partagées : la pluralité des langages disciplinaires fait de l’école une Tour de Babel labyrinthique, dans laquelle les élèves courent le risque de se perdre si, grâce à un véritable travail d’équipe, les enseignants ne leur offrent pas un fil d’Ariane. Ce travail sur les langages et sur la langue apparait d’ailleurs comme indispensable à la construction des concepts relevant des différentes cultures disciplinaires.

La seconde partie, plus centrée sur la classe de français, envisage comment la construction des capacités engage à des choix didactiques et pédagogiques qui font de celui ou celle qui enseigne le français, un praticien réflexif. Le dossier se centre sur des problématiques de l’écrit, mais la contribution de Carine Bert, qui figure sur le site des Cahiers et celui de l’AFEF, montre qu’il en va de même pour l’oral.

Les troisième et quatrième parties élargissent le point de vue, d’abord en montrant la place que la pédagogie de projet prend dans la discipline, en posant la question des enjeux, celle de l’évaluation ou en interrogeant la notion de compétence dont, nous le signalons en introduction au dossier, les contributions donnent une idée floue.

D’après vous, quelles sont les grandes évolutions dans l’enseignement du français en primaire et secondaire ces dernières années et en quoi ce dossier les accompagne-t-il ?
Parmi les évolutions du français, la première que l’on retrouve dans le dossier rejoint ce que nous soulignions précédemment en relevant la place accordée à l’interdisciplinarité, aux projets ou aux partenariats. Le français de l’école primaire et du collège n’est plus seulement le français de la littérature. Plus exactement, la littérature n’est plus le seul vecteur d’apprentissage du français. Langue de scolarisation, il concerne tous les apprentissages, les supports littéraires ne sont plus les supports exclusifs des apprentissages linguistiques. Ce fait, beaucoup plus évident à l’école primaire du fait de la polyvalence des enseignants, se développe au collège. Les usages littéraires sont devenus des usages parmi d’autres : on lit, on écrit, on parle aussi pour communiquer et pour apprendre.

On peut d’ailleurs s’étonner du peu de place que les contributions accordent au rôle des littératures dans les apprentissages, dans l’éducation de la sensibilité ou dans la construction d’une représentation du monde et du rapport aux autres.

Deuxième évolution importante, la place de l’écriture. Pendant des années, l’enseignement du français a été centré sur la lecture, la compréhension. De nombreuses contributions insistent sur la façon dont, dans la production, se construit un sujet et dont cette activité permet le développement de l’ensemble de ses capacités. Ce mouvement aussi a sans doute été initié à l’école primaire. Reste que l’articulation entre apprentissage des connaissances et savoir-faire relevant de la langue, la grammaire pour faire simple, et les usages qui en sont faits dans les différentes matières n’est pas envisagé dans ce dossier. Suffit-il d’être un usager pour « maitriser » ? Chantier d’avenir sans doute ? Futur dossier ?

Y a-t-il un ou plusieurs points particuliers qui vous ont surpris ou qui vous semblent plus marquants ?
Ce qui nous a frappées, c’est d’abord que les premières propositions de contributions sont venues de professeurs de technologie et qu’en revanche les liens entre enseignement du français et des sciences humaines ou des arts soient absents. Ce qui nous a frappées, c’est aussi l’importance accordée au vocabulaire et au lexique dès lors que l’on aborde la langue des disciplines, comme si les usages grammaticaux, syntaxiques, n’étaient pas aussi une variable importante d’un cours à l’autre et parfois selon les phases d’un cours.

Ce qui nous a frappées, c’est encore, dès lors qu’il s’agit pour les enseignants d’accompagner – et en fin de parcours de certifier – la construction de compétences, la difficulté à nommer celles-ci et l’oscillation entre une dénomination trop vaste pour être opérationnelle comme la maitrise de la langue et des micro-compétences, évaluables, mais qui peuvent tirer l’enseignement vers une pédagogie par objectifs qui a fait la preuve de son inefficacité. Il y a là sans doute une difficulté, une porte étroite à travailler. Une idée commence à faire son chemin : celle selon laquelle les pratiques langagières (parler, écrire, lire) sont les outils premiers du travail réflexif des élèves. Il s’en suit des changements en cascade : des formes et des dispositifs de travail nouveaux, d’autres gestes et postures professionnels, d’autres outils d’évaluation.

Ce qui nous a frappées, c’est enfin la culture, l’énergie, la mobilisation des collègues qui se sont impliqués et qui ont fait ce dossier. Leur volonté de partager, réfléchir, chercher ensemble.

En partenariat avec l’Association Française des Enseignants de Français (Afef). A lire : le dossier de l’Afef « Ambitieux en français », monté en parallèle avec le dossier des Cahiers pédagogiques.

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