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La discussion en éducation et en formation – Un nouveau champ de recherches

À la lecture de cet ouvrage rassemblant les interventions issues du colloque de Montpellier en mai 2003, on comprend dès l’introduction de M. Tozzi que l’« irruption massive » de la discussion dans la famille, dans l’entreprise, dans l’espace politique, à l’école ne pouvait qu’interpeller fortement les chercheurs. En effet, si la discussion est manifeste depuis la nuit des temps à travers les jeux de regards, de voix, de gestes entre une mère et son enfant, puis dans la découverte de l’autre sur le mode de l’échange, de l’imitation (Fumat et al.), elle se retrouve aujourd’hui un peu partout, parfois dans des champs d’application inédits, et ouvre la voie à des questionnements renouvelés. Extérieur entrant à l’école, application aux techniques numériques, place de la finalité ou rôle du maître, au fil des interventions on se rend compte combien la discussion « fait perdre à la tradition culturelle de sa force » mais la remet en lumière avec notamment son impératif de transmission. Par elle doit pourtant renaître une stabilisation (Habermas). Il semble rester de l’indiscutable, celui des savoirs constitués, du respect des lois et de l’autre, de la responsabilité de l’adulte à l’égard de l’enfant. Pourtant la procédure de la discussion s’introduit même dans ces champs et entre en tension avec la transmission pure (Monjo).

Alors, au gré des communications du colloque on découvre les écueils possibles de la discussion : l’éducation au débat qui servirait à « augmenter le seuil de tolérance à la frustration », le déplacement possible « d’une domination par la force à une domination par la parole », la manipulation où l’autre est à son insu transformé en objet dépossédé de son libre arbitre, les discussions non préparées qui « tournent à vide, énoncent des contre-vérités ou redécouvrent des évidences », la surestimation du langage et la sous-estimation des « savoirs d’action », la contradiction entre des intentions démocratiques et des pratiques non discutables. À ces problèmes, les recherches apportent des éléments de solutions : relier la discussion à un contenu disciplinaire, trouver des « postures qui permettent à la pensée de demeurer entrouverte » mais assurée par des éléments stables, ou encore conjuguer la force stable, conservatrice d’une culture d’établissement et sa force dynamique en vue d’un changement structurel. Ce leitmotiv désordre-nouvel ordre se retrouvera tout au long de l’ouvrage.

La discussion : cet ouvrage nous montre qu’effectivement elle ouvre sur un important champ de recherches en tant que « nouveau principe organisateur de la relation éducative et pédagogique qu’il convient de continuer à interroger » (Monjo).

Christine Vallin