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Jean Zay, le ministre assassiné

url.jpgUn très bel ouvrage, superbement illustré (documents et photos, parfois étonnants), publié à l’occasion de l’entrée du grand ministre au Panthéon avec d’autres résistants, écrits par deux spécialistes éminents des deux axes du champ d’action de Zay : l’éducation et la culture, et préfacé par Najat Vallaud-Belkacem qui se reconnait dans l’héritage du jeune ministre du Front Populaire.

Les aspects purement biographiques ne sont pas l’essentiel de l’ouvrage qui a pour but surtout de présenter l’œuvre d’un réformateur qui a lancé de nombreux chantiers. Le temps a manqué pour les réaliser, mais ils ont quand même débouché sur des réalisations à court ou moyen terme : démocratisation de l’enseignement, allongement de la scolarité, réorganisation du fonctionnement de l’institution scolaire, mise en avant de l’importance des activités physiques et culturelles à l’école…

Jean Zay fut attaqué, et pas seulement par l’extrême-droite violente qui n’acceptait pas qu’un « juif » (converti au protestantisme) puisse avoir des responsabilités nationales (voir page 118, le texte ignoble de Rebatet). On a reproché par exemple à Jean Zay d’être le ministre « de la récréation » parce qu’il attachait de l’importance aux activités de plein air, au développement de « loisirs dirigés ». « Pédagogiste fou » aurait dit peut-être tel news d’aujourd’hui, puisque ses Instructions officielles en 1938 prônaient un enseignement « moins formel et plus proche de la vie. »

Jean Zay accordait aussi une grande importance à l’expérimentation, il est en quelque sorte l’ancêtre de ces classes nouvelles d’après Libération qui sont liées à la naissance des Cahiers pédagogiques (d’ailleurs il avait François Goblot comme collaborateur). Célestin Freinet salue d’ailleurs ce nouveau cours des choses. Jean Zay veut aussi développer la formation des enseignants, notamment sur le plan des méthodes pédagogiques.

Son action dans le domaine des « Beaux Arts » est également impressionnante. On lui doit l’idée de maisons de la culture et de décentralisation culturelle notamment.

Hélas, la Guerre va briser cette carrière et si le courageux ministre devenu combattant échappe de peu à la condamnation à mort pour une soi-disant « désertion », il est en 1944 victime de la Milice qui exécute celui que les auteurs qualifient de « ministre éminemment sympathique, efficace et moderne, qui avait mis en mouvement l’école républicaine et fait se lever de grands espoirs ».

A l’heure où de trop nombreuses voix s’élèvent pour remettre en cause le mouvement de démocratisation de l’école et la lutte contre les inégalités, le combat de Jean Zay doit continuer…

À noter : En juin 2013, les Amis de Jean Zay organisaient un colloque à Paris, dont les Actes viennent de paraitre, dans un dossier spécial de la revue des CEMEA Vers l’éducation nouvelle, sous le titre « Jean Zay, toujours actuel ? » Passionnant et stimulant que ces contributions croisées d’historiens, comme Antoine Prost et militants de mouvements pédagogiques d’aujourd’hui…
Pour obtenir le numéro : publications@cemea.asso.fr

Noter aussi le documentaire télévisé diffusé par LCP à partir du 26 mai : http://www.lcp.fr/emissions/docs-ad-hoc/vod/171105-l-ecole-est-a-nous-ou-comment-jean-zay-revolutionna-l-education-nationale

Jean-Michel Zakhartchouk

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Par Linda Dugrip