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Immigration et intégration

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À partir d’un avant-propos sur cette  » France qui célébrait le 12 juillet 1998 le renouvellement de sa nation à l’image de son équipe de football : solidaire et multicolore, diverse et soudée « , les auteurs dissèquent dans cet ouvrage riche en références historiques, sociologiques, anthropologiques et philosophiques, le sentiment d’ambivalence des Français par rapport à l’immigration et des enfants d’immigrés par rapport à la France.

Ils n’hésitent pas à reprendre les questions vives telles que : Faut-il des immigrés ? Veulent-ils s’intégrer ? Mais s’intégrer à quoi ? Et le rôle de l’école dans tout cela ?

Pour répondre à ces interrogations, Jean-Pierre Obin et Annette Obin-Coulon choisissent de revisiter certaines notions afin d’en lever les ambiguïtés et de sortir des lieux communs. Ils nous offrent ainsi une étude sémantique poussée des concepts employés.

En premier lieu, ils proposent de se mettre d’accord sur les notions d’intégration et d’immigration afin d’examiner les projets politiques qui les sous-tendent en dégageant trois composantes en interaction :
– Le culturel à travers la notion d’assimilation (processus de perte de caractères culturels distinctifs d’une population immigrée).
– Le social à travers la notion d’insertion (introduction d’un particularisme qui conserve son identité et ses caractéristiques tout en contribuant à la cohérence d’un ensemble).
– Le politique à travers la notion d’intégration (sentiment d’appartenance à un ensemble social ou politique).

Puis les auteurs expliquent que le problème de l’intégration en France doit se traiter selon plusieurs dimensions (économique, juridique et morale) dans une perspective historique pour ne pas le réduire à un faux problème qui consiste à parler de l’immigré en le désignant comme tel et ainsi le stigmatiser et l’enfermer, allant à l’encontre de l’intégration elle-même.

Ils nous rappellent que deux modèles d’intégration s’affrontent en France, le modèle républicain et le modèle démocrate qui s’appuient tous deux sur des lectures divergentes des réalités sociales et nous alertent aussi sur les projets politiques pas toujours explicites qui s’y rattachent.

Ils proposent ensuite de lever les ambiguïtés du mot culture en insistant sur les deux grandes conceptions de la culture : culture d’imprégnation et culture d’acquisition faisant apparaître ainsi deux modèles antagonistes : le modèle allemand issu des romantiques et le modèle français issu des philosophes des Lumières. Pour les auteurs, on ne peut aborder l’intégration des populations issues de l’immigration si l’on ne sort pas de cette opposition entre identité et universalité. Ils citent à ce propos Hannah Arendt :  » chaque culture particulière fait raisonner quelque chose de l’universel, sans qu’aucune ne puisse prétendre seule à l’universalité « .

De la même façon, ils nous invitent à réviser l’idée de nation en fonction des deux conceptions précédentes : à l’allemande avec une nation organique qui suppose la préexistence d’une culture commune et à la française avec une nation contrat qui suppose la préexistence d’un État.

Enfin, à travers une approche historique puis clinique, les auteurs s’emploient à analyser le rôle de l’école dans les questions d’intégration. Ils nous alertent sur l’école républicaine qui, si elle s’est démocratisée, s’est aussi libéralisée.  » Si l’école française a été pensée pour mieux assurer la cohésion de la société et faire émerger la nation, contribue-t-elle vraiment à tisser le lien social ou bien participe-t-elle de son affaiblissement ?  »

Ils dénoncent une école aujourd’hui fragmentée et poreuse aux idéologies parfois les plus extrêmes.  » On est loin de l’image de l’école républicaine, creuset de la cohésion sociale, fer de lance de l’intégration.  »

En fait, cet ouvrage nous soumet, en dernier ressort, la question éthique de l’altérité, qui se situe dans une tension entre l’universalité des valeurs et la singularité des personnes, des situations et des circonstances.

Un ouvrage riche en référence et qui se lit avec plaisir, et qui surtout relève un défi difficile : être accessible au plus grand nombre tout en invitant à la réflexion théorique.

Nadia Belkis


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