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Histoire des arts : de la notion à la discipline

Le ton du Français Aujourd’hui depuis quelques années a pris une tournure universitaire, l’activité d’apprentissage des élèves reste trop souvent implicite, mais la lecture de ce numéro sera utile pour avancer dans la compréhension et la mise en place de l’histoire des arts, sans doute plutôt au collège et au lycée.

Qu’est-ce qui se joue à travers le passage de l’histoire de l’art, au singulier, discipline universitaire reconnue, à l’histoire des arts au pluriel ? C’est d’abord l’instauration, dans l’ensemble du système scolaire, d’un enseignement qui nécessite que différentes disciplines et professions se mettent en lien. Cela se marque symboliquement dans la diversité professionnelle et disciplinaire des auteurs de ce numéro.

Le dossier est ouvert par une contribution de Christiane Herth qui interroge la rupture avec la logique des enseignements artistiques. Ceux-ci approchent les œuvres par le faire. Symboliquement le dossier se clôt sur la parole de partenaires pour montrer que le parcours artistique et culturel s’inscrit dans un réseau social et une économie des arts qui font largement place à la création contemporaine.

La plupart des articles font une place à des exemples de pratiques qui illustrent le positionnement de l’histoire des arts dans la didactique des disciplines.
Un article de Sylvain Fabre, « L’histoire des arts et le temps à l’œuvre  » , montre comment les élèves peuvent construire « un rapport au passé comme distant et proche à la fois (…) objet de science en même temps que d’émotions », comment se construit une culture scolaire spécifique et un « devenir historien », grâce au site Des clics et des classes et à des pratiques d’écriture sur le modèle de la Sentimenthèque de P. Chamoiseau.

L’analyse de « l’idylle aux cerises » de Rousseau, dans les Confessions, par Geneviève Di Rosa (« De la lecture de l’image à l’enseignement de l’histoire des arts »), montre comment, dans une approche comparatiste, des connaissances issues d’autres champs disciplinaires renouvèlent la lecture d’œuvres classiques.

Caroline Archat-Tatah (« Ecrire pour devenir un spectateur amateur ») montre comment le logiciel Ligne de temps développé par le Centre Pompidou, peut permettre à des élèves participant à des dispositifs comme École au cinéma de développer leurs compétences de spectateurs avertis.

Plusieurs articles interrogent l’objectif fixé par le texte de 2008 de formation « d’amateurs éclairés ».

L’article de Jean-Charles Chabannes, « Histoire des arts et jeux de langage : comment parler de l’œuvre ? » analyse de façon critique différents discours sur l’art pour illustrer que « la sensibilité n’est pas un universel inné, mais le résultat d’une socialisation où se génèrent des dispositions ou des habitus, comme le gout ou le jugement ». Son analyse d’un « dictionnaire » Le Musée de l’art (éd. Phaidon) montre comment le discours de l’amateur éclairé, « ensemble complexe, finement tissé, de pratiques discursives hétérogènes », s’apparente à une vulgarisation des canons de la distinction qui peut dissoner avec des éléments de la culture populaire. Cette dimension politique est développée par Christian Ruby (« Quel art, quelle école? »).

Une mention particulière pour l’article d’Olivier Sidokpohou, « Giotto, c’est vieux et pas très bien dessiné! », qui s’appuie sur une action menée au lycée Jacques Brel de La Courneuve, pour expliquer comment certains modèles se sont avéré des impasses et comment une équipe a donné corps à une éducation du regard.

Dominique Segetchian