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Évaluer sans fausse note

Que je rende compte d’un atelier des rencontres reflétera sans doute davantage la couleur de mes réflexions que le fil des échanges qui furent dynamiques et peu propices à une prise de notes régulière.
Je conserve l’image d’un bouillonnement d’idées et de dialogues qui se prolongeaient souvent hors les murs de l’atelier.

Un groupe
Nous sommes 15 à nous interroger sur l’évaluation dont 2 qui animent l’atelier puisque nous sommes dans une logique de co-formation.
Lorsque chacun se présente, la diversité des parcours, des origines, des pratiques, des expériences et des réflexions apparaît. Rapidement, nous verrons qu’elle s’accompagne d’une grande richesse d’interventions et qu’elle permet les remises en cause et l’approfondissement de sa réflexion propre.

Des dispositifs
Sans détailler le déroulement des séances, je peux dire que j’y puise des idées à exploiter en classe et que j’y trouve un jeu de miroir parfois jubilatoire. En outre se (re)mettre en position d’apprendre, faire partie d’un groupe est à la fois plaisant et salutaire dans notre profession.

Donner plus de sens à l’évaluation pour l’élève et l’enseignant pour mieux évaluer

Évaluer et/ou noter, pour ceux qui sont là, c’est souvent une source d’inconfort, de doutes, voire de souffrance, sans compter que nous évoluons dans un système souvent ubuesque : la note, qu’elle sécurise ou qu’elle effraie, reste une fiction, par ce que chacun, enseignant, parents, élève, homme politique y projette.
À partir de ces constats, souvent déclinés au cours de la semaine, nous avons essayé de nous « réconcilier » un peu avec l’évaluation. Bien sûr, nous avons échangé sur ce que nous faisions ou voulions faire en matière de co-évaluation, d’évaluation formative, de différenciation et d’évaluation par compétences. Mais au delà, ce que je retiens est que tous ces outils doivent nous aider à ce qu’évaluer serve les apprentissages. Elle doit apparaître aux yeux des élèves et des professeurs comme une valeur ajoutée, une mesure sur laquelle asseoir ses progrès.

Et donc, Mieux évaluer, c’est mieux communiquer. Nos évaluations doivent être lisibles et progressives. Nous devons réfléchir à la façon de restituer le résultat aux élèves et à leurs parents, et leur expliquer à nouveau, régulièrement.

Travailler davantage avec ses collègues permet de mieux évaluer

On s’épuise à évaluer parce qu’on travaille seul (et beaucoup). Nombreux sont ceux sur le terrain qui souhaiteraient échanger davantage en équipe. Mais travailler ensemble est difficile. Cela implique de révéler beaucoup de soi et le regard de l’autre pourrait être bien sévère. Cette mise en danger qu’on assume plus ou moins s’accompagne des difficultés à expliquer ce que l’on fait. De plus, cela suppose d’accepter sa propre capacité à apprendre et de faire des compromis.
Nous avons à plusieurs reprises travaillé de la façon suivante : après un temps où chacun de son côté réfléchissait à un dispositif à mettre en œuvre en classe, nous présentions tour à tour notre projet. Nos deux ou trois collègues posaient ensuite des questions et faisaient une proposition pour améliorer le projet. Nous reprenions ensuite individuellement notre travail.
Dans cette démarche, d’une part, on se prémunit contre les jugements négatifs, d’autre part, et c’est au moins aussi important à mes yeux, on n’attend pas des autres qu’ils s’extasient sur notre projet. On compte plutôt sur eux pour en révéler les failles avec bienveillance et nous aider à l’enrichir. De plus, ce dispositif se base sur la réciprocité.

On quitte un atelier des rencontres avec des idées, des questions et surtout de l’enthousiasme et de l’énergie. On se sent conforté par ces échanges roboratifs, on pense qu’on va réessayer ce qu’on a déjà tenté et qu’on y arrivera mieux parce qu’on y a plus réfléchi.
Je garde surtout en tête la nécessaire bienveillance à l’égard de ce qu’on entreprend : se faire confiance, avoir conscience de notre investissement professionnel et de ce qu’il apporte aux élèves, ne pas se focaliser sur les manques et les défauts de nos pratiques.

L’une d’entre nous a rêvé la nuit précédent la fin de l’atelier qu’elle arrivait dans un nouveau collège dans lequel tous les enseignants étaient crapistes. Chaque professeur principal venait lui présenter ses projets et l’inviter à s’y associer. Submergée par la tâche elle décidait de rester à un mode d’évaluation traditionnel.
Sur cette trame, nous avons imaginé une parodie des modes d’évaluations. Ce fut, je crois, assez drôle, reflétant ainsi l’esprit de l’atelier. Nous nous sommes aussi amusé pendant les séances, et l’humour, qui n’est pas une compétence évaluée dans le système éducatif français, me semble bien appréciable pour bien vivre ce métier au quotidien.

Nathalie