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Des réussites trop mal connues

Cahiers Pédagogiques : Pourriez-vous souligner quelques aspects positifs de ce que vous avez pu observer, et quelques aspects négatifs ?

Je voudrais tout d’abord préciser que le rapport de l’Inspection Générale ne portait pas, au départ, sur les pratiques pédagogiques. Nous devions répondre à une question posée par le Ministre de l’Education Nationale, « l’éducation prioritaire contribue-t-elle à l’égalité des chances des élèves ? » C’est au fil de notre réflexion qu’est apparue comme majeure la question des pratiques pédagogiques. Les ZEP devaient être des laboratoires pédagogiques ; vingt ans après leur création, que restait-il de ce projet initial ? Nos enquêtes, les entretiens que nous avons menés auprès de différents interlocuteurs (rectorats, inspections académiques, directions du Ministère) ont fait apparaître que, si notre institution produit beaucoup d’analyses chiffrées, elle était au fond mal renseignée sur le cœur de l’action pédagogique, l’acte d’enseignement dans la classe. C’est pourquoi nous avons souhaité donner une place centrale, dans le rapport remis au Ministre, aux questions pédagogiques.

Vous me demandez de dé gager deux aspects positifs et deux aspects négatifs. Nous avons tout d’abord été frappés de l’engagement de la grande majorité des enseignants et des équipes de direction, ce qui n’était pas si évident ; le militantisme des premières générations pouvait s’être atténué ou perdu. Il n’en est rien : nous avons rencontré des jeunes, voire de très jeunes enseignants estimant que prendre en charge les élèves des endroits défavorisés relevait tout naturellement de leur métier ; nous avons rencontré des professeurs aguerris qui, au-delà de leur fatigue bien réelle, continuaient à enseigner dans ces conditions exigeantes et souvent difficiles. Le premier aspect positif est donc celui-ci : renoncer au déterminisme social et croire en l’éducabilité de tous les élèves, ce ne sont pas les concepts d’une poignée d’utopistes.

Le deuxième aspect positif, mais dont je ferais bien aussi un aspect négatif est le suivant : les réussites sont là, des élèves qui partaient dans le circuit scolaire avec des handicaps sociaux évidents terminent leur cursus avec profit, voire brillamment. C’est un point positif essentiel, le problème est que ces résultats ne sont pas connus de ceux qui en sont les rouages, et voilà un point très négatif. Un enseignant de collège, encore moins un enseignant de primaire, ne sait que très rarement ce qu’est devenu l’élève qu’il a contribué à former. Les rectorats, dans leur très grande majorité, n’ont pas été capables de répondre à nos questions sur le devenir des élèves de ZEP ou de REP. Combien d ‘entre eux obtiennent un bac général, on ne le sait pas toujours, combien d’entre eux obtiennent un bac professionnel, on le sait encore moins, combien d’entre eux obtiennent un CAP, un BEP, on ne le sait pas souvent du tout. Ce serait pourtant tout à fait encourageant pour les enseignants de savoir ce que leurs élèves deviennent. Globalement, notre institution est gênée dans sa réflexion par un trop grand nombre d’indicateurs dont les enseignants ne savent pas trop quoi faire : une fois qu’on sait que l’école ou que le collège est de 2,5 points en dessous de la moyenne académique, mais de 1,75 seulement en dessous de la moyenne départementale, alors que la moyenne nationale est supérieure de X point, que fait-on de ces informations dans le quotidien de sa classe et de son cours ? On mesure donc mal les réussites, on ne sait pas rendre opérationnelles des données statistiques, c’est vraiment préoccupant.

Le deuxième aspect négatif concerne l’isolement des enseignants dans le quotidien de leur métier. Si l’engagement est évident, le manque de professionnalité ne l’est pas moins. Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’enseigner dans les lieux de grande difficulté est particulièrement complexe, mais nous n’avons pas constaté, en regard, de réponses particulièrement adaptées ni du côté des IUFM ni du côté des corps d’inspection (dont nous souhaitons, dans notre rapport, qu’ils accompagnent la réflexion des enseignants de façon suivie). Notre rapport souligne la très grande qualité des travaux des chercheurs, mais leurs travaux ne sont pas connus des enseignants ; notre rapport témoigne ici et là de conceptions de cours, de façons d’enseigner, qui sont nouvelles, qui répondent aux besoins des élèves des établissements en difficulté, mais ce sont des réussites individuelles, qu’on sait mal faire connaître et transférer. L’isolement des enseignants que nous avons rencontrés s’exprime aussi fortement dans le domaine des attentes institutionnelles : ils ont le sentiment qu’on les laisse seuls se « débrouiller » avec les programmes, qu’ils n’arrivent pas à mettre en œuvre.

Votre rapport est surtout basé sur des inspections individuelles. Comment prenez-vous en compte des effets de biais ? Ainsi, en français, les enseignants hésitent peut-être à montrer à l’inspecteur les cours qu’ils jugent « risqués » : travail sur la langue, ou dispositifs novateurs (travail de groupes, etc.). Le fait d’ailleurs que les enseignants choisissent de montrer telle ou telle chose est parlant en lui-même…

Notre réflexion n’a pas été essentiellement fondée sur des inspections individuelles, c’est sans doute un effet de lecture qui peut expliquer votre impression, parce qu’il y a, effectivement, des citations de rapport assez nombreuses. Cela résulte d’un choix très concerté de notre part, pour deux raisons : d’abord, pour démontrer que contrairement à ce que l’on dit, nous avons les moyens de savoir ce qui se passe dans la classe ; il existe des milliers de rapports d’inspection (j’en ai moi-même plus de quinze cent dans mon ordinateur !), il suffit de se donner la peine de les interroger. D’autre part, il n’y a qu’en passant par le descriptif précis d’une séance observée suivi de l’avis d’un inspecteur qu’on arrive à comprendre que, d’une discipline à l’autre, d’un établissement à l’autre, d’une classe à l’autre d’une même école ou d’un même collège, on retrouve des constantes : quand on lit qu’en français, en mathématiques, en éducation musicale, une suite de micro exercices qui n’aboutit à rien d’autre qu’à un résultat obtenu mécaniquement conduit les élèves à une attitude passive, dissipée, agressive…, quand on lit que dans telle classe, en difficulté réelle, un enseignant parvient à bien mener un cours pour telle ou telle raison explicitée, on a les moyens de mener une analyse sur des questions didactiques et pédagogiques en rapport avec le public d’élèves concernés.

Mais il y a eu également des entretiens, des lectures de nombreux ouvrages et revues, des observations sur le terrain. Permettez-moi d’ailleurs de sourire devant l’image traditionnelle du professeur qui ne montrerait ce jour-là à l’inspecteur qu’une situation artificielle, celle qui « marche », ou marcherait, devant un inspecteur naïf qui ne connaîtrait pas le quotidien des classes. Dans notre rapport, vous avez dû lire les réflexions très directes, parfois cyniques, d’enseignants qui disent sans fard à leurs inspecteurs de terrain ou à nous-mêmes ce qu’ils n’arrivent pas à faire, ce qu’ils évitent de faire un jour d’inspection parce qu’ils savent qu’ils ne savent pas bien le faire, ce qu’ils renoncent tout simplement à faire. La lecture des cahiers de textes et des classeurs des élèves témoigne, par exemple, des énormes difficultés rencontrées par les professeurs de français dans l’enseignement de la langue ; et très souvent, lors de l’entretien qui suit l’inspection, c’est l’enseignant lui-même qui interroge l’inspecteur sur ce domaine, même si le cours a porté sur un travail de lecture.

Je reviens à votre question précédente : on pourrait mettre au nombre des aspects positifs de nos constats ce changement évident dans les rapports entre les enseignants et l’encadrement de proximité. Là où les inspecteurs sont présents (en collège, ce n’est pas encore le cas dans toutes les académies), nous sommes loin des rapports de contrôle de type « conformité à la fiche ». Face à la difficulté d’enseigner, la réflexion des uns et des autres, de ceux qui assument l’enseignement au jour le jour et de ceux qui l’observent, réellement, comme les inspecteurs, ou par le biais d’analyse de pratiques, comme les formateurs, est la seule solution pour « adapter les rythmes d’apprentissage et les contenus d’enseignement » (je cite notre rapport) au public des lieux de difficulté.

Vous observez que les enseignants en ZEP ont tendance, disons, à réduire les difficultés pour les élèves plutôt qu’à aider les élèves à les affronter vraiment, par exemple en ralentissant le rythme au lieu d’accompagner les élèves dans un rythme relativement soutenu, etc. Pouvez-vous développer ce point et dire comment faire évoluer cet état de fait ?

Vous abordez là le point essentiel de notre réflexion. Je me permets d’y revenir pour être certaine que nos propos sont bien compris. Il est normal qu’un enseignant, sensible aux difficultés sociales et aux difficultés personnelles de ses élèves, ait envie que la classe soit un lieu où ils seront bien, où ils réussiront à faire ce qu’on leur propose, ce qui leur permettra de construire une image positive d’eux-mêmes, où ils se tolèreront mutuellement et où règnera le calme, etc. Je le redis, on ne peut critiquer cette volonté. Le problème, c’est qu’elle entraîne souvent, de façon inconsciente, une dérive lourde de conséquences. Je vous donne une description, caricaturale bien sûr pour les besoins de la démonstration, de cette dérive : en début d’heure, l’enseignant distribue à ses élèves une liste écrite de consignes pour un travail individuel ; on se prive ainsi d’un temps essentiel de l’apprentissage, l’échange collectif sur ce que l’on va apprendre, faire, revoir, avec toutes les interactions verbales qui permettent que soient exprimées les connaissances, les erreurs, les questionnements. Mais effectivement, une telle activité ne fait pas de bruit. Le professeur circule et propose son aide à tout élève en difficulté ; pourquoi un élève ferait-il un effort s’il n’a qu’à demander de l’aide ? On voit des enseignants apporter une aide que l’élève n’a pas encore demandée. Et l’on sait que la confrontation à la difficulté fait partie intégrante de l’apprentissage. L’heure se poursuit, chacun pris dans son activité individuelle, sans que le groupe se trouve dans son rôle attendu de négociation de la tâche, du résultat, du sens. Si l’on observe le détail des consignes données ainsi aux élèves, elles sont le plus souvent extrêmement parcellisées : leur attention est guidée vers des activités de repérages ponctuels, de copie, vers des micro exercices, des tâches d’application. Rares sont les activités d’interprétation, de rédaction, de résolution de problèmes. Les élèves peuvent réussir, certes, à réaliser ce qu’on leur demande, sans pour autant qu’un savoir se soit construit, car tous les savoirs, toutes les compétences sont complexes. D’où le sentiment très décourageant chez les enseignants qu’ils peuvent recommencer l’année suivante, le trimestre suivant, voire la semaine suivante.

Que faire contre cela ? Il n’y a pas de réponse simple et courte. Il ne servirait à rien d’écrire une circulaire interdisant de parcelliser les tâches ! Je reviens donc à la nécessaire interaction des enseignants entre eux (ils ont besoin de moments pour discuter posément de ce qu’ils font), des formateurs et des inspecteurs (comme médiateurs dans les échanges, comme observateurs des pratiques, comme « passeurs » puisqu’ils voient ce qui se passe ici et ailleurs). C’est très difficile de réfléchir seul à ce que l’on fait ; un observateur, un « professeur référent » comme dans les Réseaux Ambition Réussite, permet de reprendre les éléments d’un cours : voilà ce que je comptais leur apprendre/voilà ce que je leur ai proposé/voilà le bilan que je peux tirer/pourquoi n’ai-je pas obtenu le résultat attendu ?/et toi, et vous, qu’avez-vous à m’apporter dans mon analyse ? On commence ici ou là à travailler sur des enregistrements vidéo de moments d’enseignement, et c’est passionnant : les enseignants, qui sont cette fois observateurs et non acteurs, peuvent ainsi prendre le temps d’une réflexion posée. Pour conclure, on ne fera pas l’économie de temps de formation, initiale et continue, qui permettent d’analyser le plus concrètement possible les pratiques de cours et de trouver des réponses adaptées à telle classe, à tel élève.

À l’heure des PPRE, de l’aide individualisée, les « solutions » aux difficultés passent-elles par plus d’individualisation, au risque de renvoyer chaque élève face à lui-même, en oubliant le groupe ? Plus généralement, que penser de la tentation d’avoir recours aux marges du cours plutôt que de changer ses pratiques ? Avec aussi le risque de multiplier les intervenants, y compris des intervenants peu formés ?

Notre rapport s’est assez longuement interrogé sur les grands modèles d’aide : aide au territoire ou aide à l’individu ? répartition des moyens ou discrimination positive ? Jusqu’à la question de fond : quel est l’objectif, l’égalité de traitement ou l’égalité de résultat ? En créant les 249 Réseaux Ambition Réussite, en créant l’année précédente, les PPRE, le Ministère a fait des choix, dont les résultats seront évalués. Sur un plan purement pédagogique, la seconde partie de votre question m’intéresse au plus haut point : quel que soit les choix faits pour aider les élèves, j’aimerais convaincre qu’il faut les aider dans la classe et non à l’extérieur de la classe, que c’est le cœur du métier d’enseignant, et non le terrain d’action d’intervenants extérieurs (qui ont d’autres missions). Nous avons commencé à mesurer une dérive lors de notre suivi de la première année de fonctionnement des R.A.R., celui d’une « externalisation » de la difficulté scolaire : la tentation existe de penser que, puisqu’il y a des enseignants référents et des aides éducateurs nommés pour les élèves en grande difficulté, il suffirait de les leur confier tout en continuant dans le quotidien des cours à enseigner comme on la toujours fait, comme si les élèves étaient tous les mêmes, venant d’un même milieu, avec la même culture familiale, le même rapport au langage et à l’école, et poursuivant les mêmes objectifs… Or, dans les lieux de grande difficulté, seul le travail de toute une équipe, donc de tous les enseignants peut améliorer l’efficacité de l’enseignement. C’est donc l’ensemble des enseignants, et non seulement des « spécialistes », comme c’est l’ensemble des IPR, par exemple, et non seulement l’IPR de français et de mathématiques, qui doivent trouver les solutions d’un enseignement différent.

Il y a en particulier un domaine encore laissé en friche : la logique de l’aide, individuelle ou collective, est le plus souvent une logique de remédiation. Or la difficulté d’un élève est souvent connue (les PPRE servent entre autres à cela, à garantir un suivi de l’élève d’un cycle à l’autre). Plutôt que de remédier (après), les enseignants ont à s’interroger sur l’anticipation (avant) et l’accompagnement (pendant) : c’est au moment où l’élève apprend qu’une aide est importante en cas de difficulté.

Quel rôle peut avoir, doit avoir l’Inspection ? Et la formation continue ? Comment faire prendre conscience des insuffisances dans les pratiques sans provoquer des réactions de rejet courroucé et la construction de postures de « victimes » face aux « gens d’en haut » qui ne sauraient pas ce que c’est qu’affronter des classes de ZEP tous les jours ?

En rédigeant notre rapport, nous avons essayé plusieurs appellations pour définir un rôle relativement nouveau dans l’accompagnement des enseignants. Nous avons, entre nous, utiliser les termes « coach », « sparing partner », « conseil »… Ce sont les entretiens avec les enseignants qui ont permis de définir le besoin : on nous a souvent rapporté des déceptions, traduites par exemple par le refus d’une seconde journée de stage dans le cadre d’un stage négocié en établissement, parce que le formateur n’apportait pas ce dont on avait besoin. Quel est ce besoin ? D’abord, pouvoir parler entre soi, c’est-à-dire avec des enseignants qui rencontrent les mêmes difficultés, ont en charge le même public scolaire (ainsi, des enseignants d’un collège ont souhaité rencontrer ceux d’un autre collège de la ville lui aussi appartenant à un R.A.R). Le premier rôle de l’accompagnateur, formateur ou inspecteur, n’est donc pas d’apporter une réponse déjà construite, mais de permettre l’échange, de le rendre constructif : faire passer d’une expression de l’échec, de la fatigue, du découragement, à une analyse des situations rencontrées, engager des comparaisons, interroger en commun des solutions possibles. L’inspecteur et le formateur n’ont pas le même champ d’observation : l’un observe un acte d’enseignement, l’autre analyse un discours ; l’un examine avec un enseignant le rapport entre le cours auquel il a assisté, les documents de préparation, les cahiers des élèves, les objectifs à atteindre, l’autre examine le plus souvent avec un groupe d’enseignants des documents didactiques, sans observation réelle. Les deux rôles sont importants et complémentaires. Ajoutons que l’inspecteur est responsable de la reconnaissance institutionnelle du travail de l’enseignant ; c’est entr’autres la raison pour laquelle nous avons souhaité que les inspecteurs soient régulièrement présents dans les collèges (ils le sont davantage déjà en primaire). Cette présence accrue donne à la réflexion et aux propos des inspecteurs une plus grande crédibilité : ce ne sont pas des « gens d’en haut » qui ignoreraient les difficultés de l’enseignement auprès des élèves en difficulté, mais ils ont à témoigner de leurs compétences didactiques et pédagogiques en accompagnant les enseignants dans l’analyse des difficultés de leurs élèves, dans leurs expérimentations, dans leurs évaluations.

Quel rôle peut jouer le travail autour du socle commun dans l’éducation prioritaire ? Les ZEP peuvent-elles retrouver un rôle d’expérimentation pédagogique (de même par rapport aux nouveaux dispositifs d’accompagnement à la scolarité) ?

Pour ma part, je suis persuadée que les R.A.R. ont un rôle particulier à jouer dans l’expérimentation pédagogique, mais l’expérimentation ne se décrète pas ! Nous ferons tout pour aider les enseignants à faire évoluer les pratiques pédagogiques, pour que le partenariat entre l’école et la Ville, entre enseignants et monde associatif soit le plus efficace possible, mais tout dépendra des acteurs de terrain eux-mêmes. En tout cas, si ce n’est pas d’eux que vient un renouveau pédagogique, je ne vois pas d’où il pourrait venir. Quant au socle commun, il est bien évident qu’il est une des pierres angulaires de la politique d’éducation prioritaire : si l’école ne donne pas aux enfants des milieux défavorisés les connaissances et les compétences attendues, personne ne le fera à sa place. Il reste à s’entendre sur des questions délicates : quel rapport entre les enseignements disciplinaires et les piliers du socle ? qu’est-ce qu’une évaluation de compétence ? quelle articulation entre les validations actuelles (le DNB, les évaluations nationales) et la validation du socle ? L’année scolaire va s’ouvrir par des réunions inter académiques sur le socle pilotées par la DGESCO, pour tous les élèves. Il restera à traiter plus particulièrement de ces questions dans le cadre des lieux de difficulté sociale.

Suite au rapport, quel travail menez-vous actuellement en prolongement ?

Depuis septembre dernier, nous avons piloté le suivi des 249 R.A.R. Nous nous sommes rendus dans de nombreux endroits, nous avons observé des classes, nous avons mené des entretiens, ce qui nous a permis de rendre au Ministre, en juillet 2007, un rapport sur la première année de fonctionnement. La conclusion est simple : globalement, les questions d’organisation sont à peu près réglées, l’effort doit être concentré désormais sur les questions pédagogiques, et d’abord sur l’analyse des difficultés des élèves : ce n’est pas un collège ou une école qui est en difficulté, ce n’est pas une classe, c’est un élève ; sa difficulté n’est pas en français, elle doit être définie (dans tel type d’activité, dans l’acquisition de telle compétence, dans la compréhension de telle connaissance, dans telle attitude scolaire…). Tant que ce travail n’est pas fait, tant qu’on ne sait pas précisément ce à quoi on veut remédier, il est difficile d’évaluer l’efficacité de ce que l’on fait. Je l’ai déjà dit, nous avons de très nombreux indicateurs, nous devons aider les enseignants à s’en emparer pour en faire des outils d’aide concrets pour leur enseignement quotidien.

Cette année, un groupe d’inspecteurs généraux se constitue dans la logique d’un groupe ressource pour animer et accompagner la réflexion des corps d’inspection territoriaux, premier et second degré. La liaison nécessaire entre les cycles et entre les disciplines, que nous préconisons sur le terrain, nous la mettons en œuvre au sein de l’inspection. Nous allons travailler en collaboration avec les chercheurs et les formateurs, en « formation de formateurs ». En un mot, nous ne refermons pas le dossier pour passer à une autre question ; nous sommes convaincus de la priorité absolue que représente pour l’ensemble du système scolaire français le champ de l’éducation prioritaire.

Propos recueillis par Jean-Michel Zakhartchouk, juillet 2007.