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De l’évaluation des enseignants

20 juillet de l’an de grâce politique 2012.

Au moment où habituellement les gens de l’école, au pire préparent leurs cours ou projets pour la rentrée, au mieux s’ingénient à bronzer entre les doigts de pieds, une cinquantaine de personnes est venue se mettre au frais d’un amphi-salle parisien du ministère. Au programme : l’évaluation des enseignants. Suite de la réflexion qui se poursuivra en août. Faute de l’avoir été dans le ciel, l’été aura été chaud dans les esprits de l’école.
Ce qui s’était dit le matin ? Trois points, autour desquels on continuera longtemps de tourner, selon son point de vue.

Quand évalue-t-on ?
Quels sont les différents temps, différents moments dans la carrière ? La durée d’un projet ?

Comment évalue-t-on ?
Entretien professionnel individuel, collectif ? Suite à une observation, à un rapport d’activité ? Sur une lettre de mission, une fiche de poste ? Sous la forme d’une autoévaluation, d’une inspection ? Sur la réalisation d’un projet d’équipe ? Sous forme d’audit d’établissement ?

Qui évalue ?
Personnel référent, supérieur, CE, inspecteur, regards croisés ? (dans certains pays, parents et élèves évaluent même!).

Il s’agit d’une bonne classe : on se bat pour demander la parole. Avec des bons élèves : tout le monde a des choses à dire. Peu rompus à la concision : 20 personnes qui attendent depuis leur naissance de parler dans la concertation sur l’école ce 20 juillet, ça prend du temps… Les qualités d’orateurs sont cruciales pour maintenir l’attention postprandiale de l’assistance. Certains y excellent, « Les chefs d’établissement évaluent les infirmières sans savoir faire de piqûre, ou leurs cuisiniers sans être capables de préparer mille repas. Alors évaluer des enseignants, ce n’est pas impossible. » Dans l’ensemble, les monologues apportent sans doute des éléments constructifs, que la synthèse mettra davantage en lumière en août. (Prochaine réunion : 10h-12h30 le 20 août. Travail en ateliers. Et prochaine réunion sur le sujet le 31 août.)

Moi je prends la parole pour le CRAP-Cahiers pédagogiques :

Un inspecteur, c’est tout petit, ça tient dans une tête et c’est dans la classe à chaque heure de cours, dans les moments où David n’ouvre pas son cahier, comme le jour où la classe écoute la bouche ouverte et le crayon en suspens.
L’inspection, elle commence à la seconde où l’on a connaissance du jour et de l’heure ou IL va venir dans la classe, et elle durera jour et nuit jusqu’au moment où IL aura quitté la classe.
Alors l’autoévaluation, elle existe déjà. Seulement, elle pourrait bien se mettre à tourner en boucle. Ce qui manque alors, c’est une, des voix qui interrompent la petite voix qui tourne dans la tête.

L’important pour l’école dans l’évaluation ce n’est pas tant la note, et, oui, peut-être faut-il détacher l’évaluation de la note (mais oui ça fait du bien de voir son travail reconnu, par des signes de parole, ou en gagnant un peu plus d’argent à la fin du mois, quand on a mis du sien dans son travail).
L’important, c’est l’évolution. Evoluer, avancer, se régénérer. Et tous ceux qui ont des élèves savent bien qu’un enseignant doit tenir, s’entretenir, « s’entredésir » pour que son enseignement soit bon, pour que l’école fonctionne le mieux possible.

L’évaluation, elle est alors surtout liée à l’évolution. Et l’évolution passe par les autres. Travailler sur des projets avec les collègues de son établissement, ou sur des dispositifs interdisciplinaires comme les IDD, travailler avec des collègues de sa discipline dans d’autres établissements, s’observer, se conseiller, cela se passe déjà ainsi dans d’autres pays, un récent dossier de IFE par Rémi Thibert en parle par exemple. C’est difficile de travailler ainsi, avec d’autres personnes, ce n’est pas la panacée certes, et on n’a pas d’habitudes. Mais on reçoit tellement de témoignages, aux Cahiers pédagogiques, de ce genre d’expériences, qu’il est difficile de ne pas y croire.
Ce qui se passe dans l’innovation pourrait aussi inspirer. On est souvent suivis sur des projets déjà et l’équipe s’évalue, construit une monographie et un intervenant extérieur vient à des moments divers. Pas de doute, il y a là une évaluation constructive et d’avenir.

Pas de doute pour moi, rassembler des personnes pour écouter ce qu’elles ont à dire, et leur donner l’occasion d’entendre aussi l’air du temps de l’école, c’est une bonne chose, une chose démocratique je crois bien. On peut regretter qu’il n’y ait pas plus d’enseignants qui se déplacent. C’est pourtant possible de participer et tous ceux qui demandent la parole l’obtiennent. Ce serait une bonne chose alors de diffuser plus largement le calendrier et d’entendre davantage la voix de tous, pas seulement des représentants. Une manière de diversifier, d’apporter de l’air neuf, comme nous le recommandait Yves Durand, le président de la séance ?

Christine Vallin
Rédactrice en chef des Cahiers pédagogiques